Chaque visite est unique. Chaque apparition est magique. C’est sans doute cliché d’affirmer cela mais la musique d’Ahmad le Terrible est d’une modernité grandissante au fil des ans… Et les ans, le pianiste de Pittsburgh en aligne pourtant 81. L’un des derniers géants du jazz, admiré entre autres par Miles Davis, sera sur la scène du Théâtre du Châtelet, le 9 février, à la tête d’un quartet composé du contrebassiste Reginald Veal, du percussionniste Manolo Badrena et du batteur Herlin Riley. Un concert parisien coïncidant avec la sortie de son nouvel album, Blue Moon.
L'histoire du trio piano basse batterie dans le grand livre d'or du jazz compte un nombre restreint de prophètes. Ahmal Jamal est l'un d'entre eux. Depuis la nuit des temps, le maître de Pittsburgh tisse avec sa rythmique la sémantique d'un dialogue profond et sincère. La discussion se fait toujours à trois chez Jamal ; voire à quatre lorsqu’un percussionniste vient s’immiscer dans l’affaire comme pour ce concert du 9 février. Même lorsque le pianiste voudrait nous faire croire que ses acolytes ne sont qu'une gentille garde prétorienne, faire valoir savant d'un musicien égoïste.
A l'image de l’impeccable Reginald Veal qui lovera les contours de ses lignes de contrebasse dans les moindres recoins des histoires que contera Ahmad Jamal. Même la sonorité du chant de cet immense pianiste est indissociable cette rythmique. Et à 80 printemps passés, la fusion est plus que jamais totale.
Né en 1930 à Pittsburgh, Jamal est l’héritier d’une tradition pianistique dont les jalons sont avant lui Nat King Cole et Erroll Garner. Miles Davis lui rendra également hommage en reprenant plusieurs de ses thèmes, tels Ahmad’s Blues et New Rhumba.
Mais, outre ses propres compositions, Ahmad le Terrible revisite aussi inlassablement les standards. Dès l’album Chamber Music Of The New Jazz qu’il enregistre en 1955 avec son trio, on peut l’entendre réinventer des classiques comme A Foggy Day ou All Of You. Et, plus récemment, il gravait en 2000, sur le disque de son 70e anniversaire à l’Olympia, des versions inoubliables de Autumn Leaves ou My Foolish Heart…
Dans une interview de 1998, Ahmad Jamal disait : « Je ne connais personne qui travaille dans cette musique et qui n’utilise pas les standards. C’est ce qui rend unique la musique classique américaine. Je pense que nous avons interprété ces standards au-delà des rêves les plus fous de leurs compositeurs… »
Sur ce clip, Jamal et son mythique trio composé du contrebassiste Israel Crosby et du batteur Vernell Fournier en 1959 dans Darn That Dream :
