La pianiste britannique Imogen Cooper fêtait ce mercredi 28 août ses 70 printemps. Son nouvel album, radieux, s'aventure dans un répertoire qu'on ne lui connaissait pas.

Celle qui excelle dans le répertoire germanique s’autorise enfin à graver des œuvres plus méridionales. L’album, intitulé Iberia y Francia, mêle les œuvres des Français Ravel et Debussy à celles des Espagnols de Falla, Albéniz et Mompou. Le thème de l'ailleurs, source d'inspiration inépuisable pour les artistes, est en réalité un prétexte pour explorer des univers sonores inouïs. Le folklore a ainsi prêté ses mélodies et ses rythmes aux compositeurs allemands chers à Imogen Cooper. Elle joue ici la Mélodie hongroise en si mineur, D. 817 de Schubert avec un allant irrésistible qui irradie la nostalgie de cette page jusqu'à la neutraliser :

Imogen Cooper plays Hungarian Melody in B minor, D817 by Franz Schubert

R3volving

Cette attirance pour l’exotisme a été encore revivifiée par l’Exposition universelle de 1900 à Paris. C’est notamment dans la représentation d’une Espagne rêvée et réinventée que le premier XXe siècle français a traduit son désir d’ailleurs.

Mais Imogen Cooper sait reconnaître les idiomes sous les évocations. De Ravel, elle souligne ainsi la « maîtrise française » en veillant à ne pas alanguir le caractère de sa Pavane sous peine de trahir le maintien de l’Infante. Et dans La Soirée dans Grenade de Debussy, la deuxième Estampe qui exploite rubato, effets de guitare et contrastes rapides sur fond de habanera, le jeu d’Imogen Cooper met en exergue les belles harmonies et l’espièglerie de certains passages comme l’intervention du thème mauresque. Au-delà des prétextes pittoresques, Debussy cherche à tirer du clavier des sonorités propres à éveiller des sensations nouvelles en musique. Et d’Albéniz, la pianiste détaille avec poésie les différents types d’attaque : loin des espagnolades imitant les modes de jeu de la guitare (Fête-Dieu à Séville) ou des instruments à vent (El Albaicín), ces moyens – inédits au moment de la publication du premier cahier d’Iberia – agrandissent la palette sonore du piano. Ce sont encore ceux de Mompou dans ses Canciones y Danzas dont la simplicité pointe vers le post-modernisme.

Le disque, dont on perçoit l’alternance des pièces comme l’enchaînement extrêmement fondu des mouvements d’une même partition, est un régal. Imogen Cooper est notre guide le temps d’un voyage dans un archipel imaginaire dont les étapes sont autant d’îles joyeuses.

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