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Felix Mendelssohn

Le compositeur, pianiste, organiste et chef d'orchestre Felix Mendelssohn, petit-fils du philosophe Moses Mendelssohn, est né à Hambourg en Allemagne le 3 février 1809 dans une famille aisée (père banquier). La maison familiale est un lieu de rencontre pour l'élite intellectuelle que fréquentent entre autres le compositeur Carl Friedrich Zelter (ami de Goethe), le philosophe Georg Wilhelm Friedrich Hegel et l'écrivain et poète Heinrich Heine ; en même temps qu'il reçoit une éducation raffinée, l'enfant prodige développe ses talents multiples (équitation, danse, langues anciennes, mathématiques, peinture, et dessin au pastel où il fait preuve d'un incroyable talent), travaille la composition avec Zelter tout en engrangeant une culture encyclopédique, de la philosophie de l'art qu'il étudie avec Hegel, à la philologie, au droit, à la géographie, l'histoire et la zoologie.



Pourtant, il n'est pas facile pour ce jeune homme sensible d'être non seulement juif mais aussi brillant sujet, même s'il est chrétien et s'il peut compter sur le soutien d'un protecteur tel que Goethe. Quand il postule pour diriger la Singakademie de Berlin (où il avait été admis comme alto en 1819, à l'âge de dix ans), on lui préfère un candidat médiocre mais plus chrétien que lui. Et en 1827, son opéra, Les Noces de Gamache fait un flop à Berlin. C'est à Leipzig qu'il passera les meilleures années de sa courte vie, à la tête du Gewandhaus, de 1835 à 1847. C'est dans cette période aussi qu'il épouse le 18 mars 1837 Cécile Jeanrenaud, la ravissante fille d'un pasteur de Francfort d'origine française ; l'union sera très heureuse et donnera naissance à cinq enfants (Carl, Marie, Paul, Felix et Elisabeth). Il mène des activités multiples, se partageant entre Londres, Leipzig et Berlin où le roi Frédéric Guillaume IV lui demande de prendre en main la musique de la cour et de la cathédrale, devenant ainsi Generalmusikdirektor royal. Défenseur de Bach, Haendel, Beethoven et Mozart, il reçoit Berlioz en 1843, créé les deux premières symphonies de Schumann (qui voit en lui le « Mozart du XIXe siècle ») avec lequel il se lie d'amitié et fonde le Conservatoire. L'année 1847 est marquée par la perte, le 14 mai, de sa soeur chérie, Fanny (son double musical), qui le terrassera, et le commencement de la détérioration de sa santé.



Adulé, honoré, admiré de son vivant - et pas par les moindres : Schumann, la reine Victoria, Goethe. -, Felix Mendelssohn a lentement mais sûrement été fusillé par plusieurs générations d'observateurs, de critiques et de jaloux après sa mort. On lui reprochait pêle-mêle sa «facilité» (qui était en vérité une immense clarté), son judaïsme (no comment.), sa réussite sociale (faut-il avoir mangé de la vache enragée pour avoir droit aux honneurs posthumes ?), et même sa générosité a été teintée de quelques commentaires acides (car est-il humainement possible d'être généreux sans arrière-pensée ? Fi donc !). Schumann remet quand même les pendules à l'heure dans ses notes sur les souvenirs de Mendelssohn à propos de son attitude vis-à-vis d'autres compositeurs vivants : « Là où il n'avait rien à louer, il restait réservé ; là où il trouvait un indiscutable talent, il était le premier à le remarquer. »



Malgré le dénigrement dont Felix Mendelssohn est encore et toujours l'objet, l'étonnante perfection de ses oeuvres écrites à l'adolescence n'a pas d'égal dans l'histoire de la musique. Il reste l'un des compositeurs les plus joués de notre temps, au moins du haut de son merveilleux Concerto pour violon (beaucoup plus moderne, du moins formellement, qu'on pourrait le croire à la simple écoute), de sa génialissime Ouverture pour le Songe d'une nuit d'été écrite, faut-il le rappeler, à l'âge de dix-sept ans et pourtant un chef-d'oeuvre d'intelligence orchestrale et architecturale. Dommage que sa Marche nuptiale (tirée de la musique de scène du même Songe écrite bien des années plus tard) qui accompagne une bonne partie des mariages depuis les années 1850, après que la reine Victoria l'eut fait jouer pour les épousailles de l'une de ses filles, soit autant mise à l'honneur alors qu'elle n'est pas du tout représentative de l'élégance suprême de l'écriture mendelssohnienne. Les esprits railleurs pourront s'amuser qu'une marche nuptiale soit d'une telle lourdeur, délibérément martiale et pompeuse. En réalité Mendelssohn entendait illustrer, dans la pompe et les triomphes suggérés par Shakespeare, les éclatantes noces d'un redoutable guerrier, Thésée, et d'une redoutable guerrière répondant au doux nom d'Hippolyta (pire, c'était la reine des Amazones, des dames-qui-préfèrent-la-compagnie-des-dames selon la tradition antique, et qui n'utilisaient les services des messieurs qu'une fois l'an pour la bonne cause). L'on s'étonnera aussi que l'Eglise ait pu tolérer en pleine époque victorienne que l'on jouât dans son saint giron une musique célébrant a priori le mariage de ces deux affreux païens polythéistes qu'étaient Thésée et Hippolyta.



La descente aux enfers de Mendelssohn dura jusqu'à l'époque nazie, pendant laquelle sa musique fut carrément taxée de dégénérée et interdite, même si l'Angleterre lui garda toujours une place pas trop loin du coeur - ou, plutôt, pas trop loin du choeur puisque le pays est célèbre pour ses innombrables chorales qui chantent, année après année, l'oratorio Elias, le dernier grand chef-d'oeuvre du compositeur qui reçut un triomphe lors de sa création à Birmingham et dont même Berlioz pensera le plus grand bien : « C'est magnifiquement grand et d'une somptuosité harmonique indescriptible ». Trop poli, trop honnête, trop social, trop gendre idéal, trop jet-set (ou plutôt calèche-set à cette époque) alors que l'état de compositeur romantique exigerait une condition un peu plus ravageuse. D'aucuns imaginent que cet état de félicité permanente a fait tache sur sa musique qui serait dépourvue par conséquent de profondeur, d'intensité, de masculinité. Mais Mendelssohn devait quand même n'en pas trop manquer lorsqu'en 1835 il s'est agi de prendre la direction musicale à l'âge de vingt-six ans du Gewandhaus de Leipzig dont il fera l'orchestre symphonique le plus prestigieux d'Allemagne, son influence à ce poste se révélant déterminante - on lui avait offert aussi l'Opéra de Munich au même moment. Il ne faut point trop en manquer non plus pour diriger, à l'âge de vingt ans, le 11 mars 1829, la première exécution depuis 1750 du chef-d'oeuvre alors oublié qu'était la Passion selon saint Mathieu de Bach, événement qui le rend célèbre dans toute l'Allemagne par les remarquables qualités musicales qu'il dévoile ! Et combien donc faut-il en avoir encore pour fonder à trente-quatre ans le Conservatoire de Leipzig en invitant Robert Schumann, Ignaz Moscheles, Joseph Joachim à y dispenser leur savoir ?



Que Mendelssohn ait été un peu frêle, qu'il ait porté des gants beurre, la canne, les rouflaquettes et le haut-de-forme, n'est qu'anecdote : toute sa musique parle pour lui, et les chefs-d'oeuvre ne manquent pas, même si son génie n'a pas la même envergure que celui de Beethoven - lui-même, d'ailleurs, se considérait autant comme un compositeur que comme un pianiste (très accompli, semble-t-il) et un chef d'orchestre (qui fut très talentueux). Berlioz lui-même, qui n'était pas toujours tendre avec Mendelssohn compositeur, lui tira épistolairement son chapeau à l'occasion de son voyage en Allemagne en 1843, lorsque les deux musiciens dirigèrent conjointement l'orchestre : « Grand chef ! Nous nous sommes promis d'échanger nos tomahawks ; voici le mien ; il est grossier, le tien est simple ; les squaws seules et les visages pâles aiment les armes ornées. Sois mon frère ! et quand le Grand Esprit nous aura envoyé chasser dans le pays des âmes, que nos guerriers suspendent nos tomahawks. » Berlioz venait de digérer Fenimore Cooper. C'est encore Berlioz qui déclara : « Il n'y a qu'un Dieu à Leipzig, c'est Bach : et Mendelssohn est son prophète », ce dont se défendit toujours Mendelssohn qui n'a jamais voulu le copier, l'influence de Bach dans sa musique religieuse étant d'ailleurs moins forte que celle de Haendel.



Ses plus célèbres ouvrages, auprès du grand public, restent l'Ouverture du Songe d'une nuit d'été, l'Ouverture des Hébrides, le Concerto pour violon, et les troisième et quatrième symphonies, respectivement « Ecossaise » et « Italienne », en souvenir/évocation de beaux voyages en Ecosse et en Italie. Tout le monde connaît l'existence des Chants sans paroles mais peu de ces pièces sont vraiment connues de nos jours, alors qu'elles firent les délices des boudoirs du XIXe siècle. Peut-être est-ce précisément cette raison qui les font bouder : dommage, ce sont de petits bijoux. On n'oubliera pas non plus le génial Octuor à cordes, un magistral essai de jeunesse à seize ans, pleinement transformé. Mais l'auditeur un peu curieux aurait tout intérêt à se pencher, par exemple, sur ses magnifiques Quatuors à cordes, qui sont sans doute ses oeuvres les plus personnelles, les plus intimes, les plus douloureuses aussi, en particulier le Sixième Quatuor, op. 80 de 1847 inspiré par la mort de sa soeur Fanny qui sera suivie quelques mois plus tard de la sienne. Bien que beaucoup moins connu, on ne peut passer sous silence l'important corpus de musique religieuse, reflet de sa foi profonde et sincère, où figurent des Psaumes, Motets, cantates et son premier oratorio Paulus dont le succès fut aussi colossal que celui d'Elias. Resteront inachevés un opéra (Loreley) et un oratorio (Christus). S'il est un domaine dans lequel Mendelssohn n'a guère d'égal, c'est quand même celui du scherzo : l'élégance rapide, la transparence, la fluidité spirituelle, c'est sa griffe. On se rappellera le fantastique scherzo du Songe d'une nuit d'été, celui de l'Octuor, ceux des quatuors, celui de l' « Ecossaise » . Loin d'être toujours lisse, son écriture sait également dessiner un contrepoint vigoureux, une orchestration flamboyante, un relief dramatique.



Alors qu'il aurait largement pu survoler une grande partie de son siècle, Mendelssohn est l'un de ces grands hommes dont la disparition prématurée le 4 novembre 1847 à Leipzig (enterré à Berlin) a été profondément ressentie : il a marqué le monde de la musique non seulement en Allemagne mais aussi en Angleterre où il était très aimé, ainsi qu'aux Etats-Unis et en Russie. Qu'aurait-il donc produit s'il avait eu le temps de vieillir ? Certes, la grande majorité de ses chefs-d'oeuvre datent, curieusement, de ses premières années de maturité, mais rien n'indique non plus qu'il aurait pu évoluer vers un langage plus hardi après avoir côtoyé Schumann quelques années de plus, après avoir entendu Brahms, Liszt, et même Verdi ou Wagner. Le seul domaine dans lequel il a cédé le pas à ce dernier est naturellement celui de l'opéra - s'y serait-il frotté s'il avait vécu plus longtemps, ou l'ombre écrasante de son fier adversaire l'aurait-elle empêché de prendre le risque ?



Wagner, justement. En 1836, le jeune Wagner, 23 ans et déjà toutes se dents, avait envoyé au très célèbre Mendelssohn - de quatre ans son aîné seulement, imaginez la jalousie du petit Richard - sa Première symphonie. Mendelssohn n'avait pas répondu... mais lorsque ce dernier assista à la création du Vaisseau fantôme, il semble avoir été totalement indigné par l'ouvrage, ainsi que le rapporte Schumann. Certes, il dirigea l'ouverture de Tannhäuser lors d'un concert avec son orchestre de Leipzig en 1846, mais le résultat n'a pas été concluant, ni musicalement, ni humainement : Mendelssohn était un classiciste, un traditionaliste, Wagner un bouillonnant révolutionnaire - qui se vengera cruellement de Mendelssohn dans son imbécile pamphlet La Judéité dans la musique, publié dès 1850 (sous le pseudonyme K. Freigedank, « K. Libre-pensée » !) mais développé dans une version plus amplement stupide encore en 1869 sous son propre nom désormais célèbre. Dans son langage incroyablement emberlificoté, confus, prétentieux, il déroule un tapis de fielleries dont voici un exemple, non pas dans la traduction française habituellement disponible (très littéraire, polie et presque fréquentable), mais dans une transcription le plus fidèle possible des circonvolutions verbales dont Wagner était friand. Ne tirez pas sur le traducteur : si c'est savonneux en français, ça l'est tout autant en allemand ! :


« Felix Mendelssohn Bartholdy nous a démontré qu'aucun juif, quand bien même il posséderait le plus riche talent spécifique, la culture la plus délicate et la plus étendue, le sens de l'honneur le plus élevé et le plus sensible qui soit, ne pourrait jamais - malgré toutes ces qualités - produire ne serait-ce qu'une fois la moindre de ces si profondes impressions de coeur et d'âme que nous sommes en droit d'attendre de l'Art ; car nous savons qu'il [l'Art] en est capable, car nous avons mille fois ressenti cette sensation, dès qu'un Héros de notre Art, pour ainsi dire, ouvrait seulement la bouche pour s'adresser à nous.


Laissons aux critiques de métier, qui ont accédé à la même conscience de nous à ce sujet, le soin de confirmer par l'exemple (tiré des productions artistiques de Mendelssohn) le bien-fondé de ce phénomène ; qu'il nous suffise pour le moment, afin d'expliquer notre sensation générale, de préciser qu'à l'écoute d'une pièce de ce compositeur, nous avons pu nous sentir captivés seulement lorsque rien d'autre n'était offert à notre fantaisie plus ou moins en quête de divertissement - au-delà de la présentation, l'alignement ou l'enchevêtrement des formes les plus élégantes, lisses et artificielles, comme l'attirance pour les changements de forme et de couleurs d'un kaléidoscope -, mais jamais lorsque ces figures étaient destinées à prendre la forme de sentiments humains de coeur, profonds et robustes. »




Original allemand de l'extrait cité de Das Judenthum in der Musik :

Felix Mendelssohn-Bartholdy hat uns gezeigt, daß ein Jude von reichster specifischer Talentfülle sein, die feinste und mannigfaltigste Bildung, das gesteigertste, zartestempfindende Ehrgefühl besitzen kann, ohne durch die Hilfe aller dieser Vorzüge es je ermöglichen zu können, auch nur ein einziges Mal die tiefe, Herz und Seele ergreifende Wirkung auf uns hervorzubringen, welche wir von der Kunst erwarten, weil wir sie dessen fähig wissen, weil wir diese Wirkung zahllos oft empfunden haben, sobald ein Heros unsrer Kunst, so zu sagen, nur den Mund aufthat, um zu uns zu sprechen.

Kritikern von Fach, welche hierüber zu gleichem Bewußtsein mit uns gelangt sein sollten, möge es überlassen sein, diese zweifellos gewisse Erscheinung aus den Einzelnheiten der Mendelssohnschen Kunstproductionen nachweislich zu bestätigen : uns genüge es hier, zur Verdeutlichung unsrer allgemeinen Empfindung uns zu vergegenwärtigen, daß bei Anhörung eines Tonstückes dieses Componisten wir uns nur dann gefesselt fühlen konnten, wenn nichts Anderes unsre, mehr oder weniger nur unterhaltungssüchtigen Phantasie, als Vorführung, Reihung und Verschlingung der feinsten, glättesten und kunstfertigsten Figuren, wie im wechselnden Farben- und Formenreize des Kaleidoskopes, dargeboten wurde, - nie aber da, wo diese Figuren die Gestalt tiefer und markiger menschlicher Herzensempfindungen anzunehmen bestimmt waren.




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