Hi-Res
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Attention, disque sublime. Voici réunis deux quatuors à cordes de deux compositeurs qui se sont distingués dans des genres tout différents, l’opéra pour Verdi, la symphonie et le poème symphonique pour Sibelius. Deux compositeurs d’horizons opposés, aux esthétiques et aux univers incomparables certes. Pourtant, le formidable Vertavo String Quartet – l’un des meilleurs quatuors au monde – les unit par un lyrisme irrépressible et une tendresse ensoleillée, d’une très grande sensibilité, et subtilité.Verdi a composé, avec « amusement », son bref Quatuor en 1873, regardant cette pièce de musique de chambre avec distance, en aucun cas le considérant comme une œuvre majeure. Le Vertavo String Quartet la place naturellement dans la tradition germanique, pas si éloignée des œuvres d’un Mendelssohn par exemple, en en détaillant pourtant l’instrumentation inventive, dans le curieux finale notamment, un Scherzo en forme de canon, d’allure Allegro assai mosso, dont certains procédés, étrangement, appellent l’univers du compositeur finlandais, avec ses quelques pédales harmoniques aux basses : le lien avec Voces intimae de Sibelius en devient naturel. Bien sûr, le monde expressif demeure radicalement différent.Dans le Sibelius, Les cordes incroyablement belles des Vertavo sont d’une clarté proprement inouïe, et les balances entre les quatre instruments, si difficiles dans cette partition souvent négligée, simplement exceptionnelles (Vivace, Adagio di molto). Composé en 1909, le Quatuor « Voces intimae » demeure intimement lié à la Quatrième Symphonie, et le matériau de l’Adagio di molto trouvera un second épanouissement dans le mouvement lent (Il tempo largo) de la Quatrième. Les Vertavo jouent justement le Quatuor « Voces intimae » comme une symphonie miniature, détaillant avec une précision presque chirurgicale (mais jamais froide !) les superpositions harmoniques, l’éclatement des textures, l’absence totale de polyphonie classique : l’aspect purement timbral de l’univers sibélien se déploie avec un naturel envoûtant – inoubliables, les passages en « moto perpetuo » de l’Allegro final !Ici, le Vertavo String Quartet, par sa justesse stylistique, signe sans doute l’une des interprétations les plus fortes depuis celle, historique, du Fitzwilliam String Quartet pour Decca en 1978. © Pierre-Yves Lascar/Qobuz