En 2015, la Fédération française d’athlétisme interdisait les baladeurs pour les courses hors stade. En cause : le coup de boost apporté par la musique, dont le bénéfice sur les performances sportives a été prouvé scientifiquement. La musique serait-elle une si parfaite alliée qu'on pourrait la considérer comme un dispositif de dopage ? Éclairage sur ces phénomènes psychologiques et physiologiques qui font de la musique la meilleure amie du sportif.

La musique neutralise la sensation de douleur

C'est parce qu'elle possède des vertus « audio-analgésiques » que la musique nous permet de repousser et de dépasser nos limites, d'où l'appétence des sportifs pour les sessions rythmées. Lorsque nous effectuons un effort physique avec I'm So Excited des Pointer Sisters dans les oreilles, Jump de Van Halen ou bien encore l'album You Can Dance de Madonna dans notre casque, cela réduit la sensation subjective d'effort. Quiconque a déjà tenté de repousser ses limites a bien conscience que, lors d'une session de sport, notre énergie peut considérablement décliner si l'on se met à ressentir la douleur. Or, dans une étude de Roy, Peretz, & Rainville datant de 2008, il est démontré que la musique favorise la libération d’hormones opioïdes telles que l’endorphine, proche de la morphine. Cela tend à expliquer pourquoi certains styles musicaux ou certains morceaux nous permettent de nous surpasser.

Les effets dynamogéniques de la musique sur l'organisme

Depuis l'étude Patel, Iversen, Chen & Repp de 2005, on sait que certains extraits musicaux favorisent la tonicité du corps et l’amélioration spontanée de la posture, autant de bienfaits dynamogènes (qui donnent du tonus). Plusieurs études scientifiques confirment que courir ou faire du vélo en rythme avec de la musique diminue le coût métabolique de l'activité par l'augmentation de l'efficacité des mouvements, et retarde de 10 % environ la sensation de fatigue lorsque l'effort devient plus intense (source : La Symphonie neuronale, E. Bigand / B. Tillmann). C'est d'ailleurs pour cette même raison que les marathoniens professionnels n'ont pas l'autorisation de courir en musique lors des compétitions nationales ou internationales... Des chercheurs de l'université de Liverpool ont réalisé un test sur une douzaine d’étudiants en bonne santé. Ces derniers ont dû pédaler pendant 25 minutes sur un vélo d'appartement et les résultats parlent d'eux-mêmes : les étudiants ayant réalisé l’effort sur de la musique accélérée ont obtenu de meilleures performances par rapport aux étudiants qui s’entraînaient sur des rythmes plus lents.

Une autre étude, réalisée cette fois-ci avec des joueurs de tennis placés dans un scanner d'imagerie cérébrale, révèle un fait surprenant : la musique active les réseaux de l'attention, de la motivation ainsi que le cervelet, augmentant mécaniquement la performance motrice des joueurs ! En d'autres termes, le fait d'écouter des morceaux de valence dynamique et positive (la valence d'un extrait musical est sa capacité à créer des connexions) en amont d'une épreuve sportive nous aiderait à améliorer notre endurance et nos compétences techniques. Les effets bénéfiques de la musique sur la performance sont encore plus prononcés dans les sports collectifs où l'on constate une meilleure synchronisation des actions et une durée d'effort qui peut être allongée jusqu'à 17 %.

Un moyen de se mettre dans la bonne fréquence émotionnelle

Des chercheurs de l'université de Californie ont mené une étude sur plus de 2 000 personnes aux États-Unis et en Chine, en les soumettant à 2 168 extraits musicaux. Il en ressort que la stimulation musicale génère jusqu'à 13 types d'émotions distinctes. Parmi ces émotions, une dizaine sont considérées comme ayant un caractère « positif » : amusante, belle, relaxante, rêveuse, énergisante, érotique, provocante, joyeuse, triomphante et héroïque. Cela confère à la musique un pouvoir sur nos émotions, et c'est en ce sens que nous pouvons la considérer comme une véritable « télécommande émotionnelle » capable de nous mettre dans une fréquence affective plus en adéquation avec le challenge sportif. On pourra à loisir s'orienter vers la pop colorée des années 80 ou les classiques soul/funk/disco de la fin des années 70, autant d'univers musicaux punchy qui nous aident à vibrer sur une fréquence émotionnelle dynamogène, c’est-à-dire qui nous alimente en énergie.

L'ancrage : quand la musique devient un rituel

Il n'est pas rare, dans des reportages sur des sportifs de haut niveau, de constater que les athlètes professionnels ont tendance à s'enfermer dans une sorte de « bulle musicale » à l'approche d'une compétition. Ce conditionnement répond à une fonction précise : le sportif ritualise l'approche de la compétition afin de se sentir plus en sécurité. En maîtrisant les stimulations sensorielles qui lui parviennent (en l'occurrence, les stimulations auditives), l'athlète reprend le contrôle sur son expérience. D’où l’intérêt d'instaurer des rituels pour mieux apprivoiser le doute et les tensions qui précèdent les échéances sportives importantes. En parallèle, le sportif utilise intuitivement la fonction d'ancrage qui lui permet de se mettre quasi instantanément dans un état mental et émotionnel prédéterminé. Par exemple, si un tennisman a pour habitude d'écouter Gonna Fly Now de Bill Conti (le thème de Rocky) avant chaque match, ce rituel lui permet de se sentir en contrôle tout en induisant un état psychologique propice permettant d'aborder le match de la meilleure façon. A force d'appairer un morceau ou un album à un contexte, on crée ce que l'on nomme un ancrage, un formidable raccourci vers la performance.

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