Indéfiniment

Chronique

Figure de la mode parisienne, mais depuis toujours passionnée par la musique, Yara Lapidus a franchi le pas en 2009 en concoctant un album sobrement intitulé Yara. Dans le présent opus, elle rentre dans la cour des grands en s’associant à Gabriel Yared – auteur des BO de Camille Claudel et du Patient anglais, grâce auquel il a décroché un Oscar en 1997. Dès la première chanson, Depuis Toi, on reconnaît la patte du compositeur de musique de film derrière ce crescendo instrumental soutenu par des cordes tendues et une rythmique efficace. L’autre signature de Yared, c’est cette façon unique de créer des mélodies faussement simples où l’émotion effleure, sans effusion. C’est le cas du morceau Indéfiniment, qui, bien qu’il soit à quatre temps, sonne presque comme une valse à la beauté contenue. Sur d’autres titres, il se replonge dans de vieux démons musicaux des années 70 et 80, comme la musique du Brésil – pays où il vécut pour y affiner son éducation musicale. On retrouvera tout ce savoir-faire dans Saudade de Vôce et Un Matin sans toi. Quant au très funky No no no no t’en fais pas, il rappelle naturellement sa « période Françoise Hardy », dont il a été le compositeur et arrangeur sur de nombreuses chansons (dont le tube J’écoute de la musique saoûle). L’album se conclut avec une version chantée du fameux thème de 37°2, le matin, en duo avec Gabriel Yared, dont la voix n’a rien à envier à celle, veloutée et chaleureuse, de sa partenaire.

Tous deux d’origine libanaise, Yara Lapidus et Gabriel Yared n’ont cependant pas cherché à faire renaître outre mesure leurs racines méditerranéennes dans cet album qui se veut universel et intemporel. « Le point de départ est le timbre de Yara, pour lequel j’ai composé mes mélodies. Ses textes sont venus ensuite presque naturellement. Enregistré avec 43 musiciens dans les mythiques studios d’Abbey Road, cet album représente la quintessence de mon univers musical », estime le compositeur. La voix soyeuse de Lapidus conjuguée à la musique tirée au cordeau de Gabriel Yared donne un album dense, attachant et gracieux. © Nicolas Magenham/Qobuz