Difficile de croire qu’en une demi-décennie à peine, l’étiquette Bonbonbon s’est forgée une réputation dépassant les frontières québécoises.

Surtout si on pense que peu de temps après sa création, une certaine pandémie allait faire des ravages sur le quotidien de bien des musiciens… Alexandre Archambault, le co-créateur du label avec Tommy Bélisle, nous raconte la jeune mais impressionnante histoire de son bébé.

Lui-même membre de la formation Mort Rose, il en savait déjà un bout sur le merveilleux monde de la musique. Son complice, Tommy Bélisle, avait quant à lui fait ses gammes avec Choses Sauvages. S’ils ont officiellement enregistré leur compagnie en octobre en 2019, c’est en janvier 2020 qu’ils ont fait le party le de lancement.

Totalement Sublime
Totalement Sublime, 2024

«That’s it! On aura essayé…»

Qui dit janvier 2020, dit aussi pandémie à venir. Comment réagit-on à un phénomène de cet ampleur avec une étiquette naissante? «Pendant deux semaines, on s’est dit « That’s it! On aura essayé… » On venait de lancer la marque. C’était la fin du monde!»

Pas évident de gérer une fin du monde quand on sait à quel point les deux compères avaient tout donné: «On avait la flamme! On avait pensé à notre affaire. On avait commencé à avoir des artistes, des contrats. Il y avait Vanille, Mort Rose, Larynx.»

Et alors? Comment se fait-il qu’ils sont toujours là 5 ans plus tard? «Tout le monde a commencé à annuler leurs tournées, leurs sorties d’albums. On s’est dit que si on commençait à sortir des albums en numérique, ça allait peut-être marcher. Tout d’un coup, Super Plage et Vanille se sont mis à buzzer.»

Ainsi, une place médiatique s’est créée pour les artistes émergents alors que les groupes établis attendaient patiemment le retour des beaux jours avant de produire quoique ce soit.

«Ça a été un levier pour nous la pandémie!»

Mais ce vide ne saurait résumer à lui seul l’expansion rapide de Bonbonbon. Leur secret? Ils offraient aussi des services à la carte pour refiler un coup de main à des artistes indépendants qui en avaient bien besoin. Sans pour autant les prendre sous leurs ailes et leur faire signer un contrat. Ces opérations en parallèle ont permis d’apporter des revenus assurant la survie - voire le succès - de la jeune entreprise.

«La première année on a travaillé avec une soixantaine d’artistes. Ça a été un levier pour nous la pandémie!», résume Archambault, enthousiaste. Cette double structure constitue l’ADN de Bonbonbon dès son origine:

«Les gens nous demandaient: « comment vous faîtes pour partir un label en 2020? » Il n’y a plus de revenu nulle part. Si on ne voulait pas faire de compromis artistiques et signer seulement des bands qui nous faisaient tripper, il fallait qu’on fasse de l’argent quelque part. Sinon notre projet était voué à l’échec..»

Cette entité, dite de «service à la carte» de Bonbonbon a tellement pris de l’importance au sein de la PME qu’elle sera baptisée, Bonne promo. Eh oui! Un nom pour elle toute seule.

(C’est tout un scoop que nous révèle Alexandre Archambault car l’annonce officielle devait être faite lors des célébrations des 5 ans.)

«Amener un projet de qualité à son plein potentiel…»

À l’écouter parler, on a l’impression que le jeune businessman rayonnant n’est jamais en conflit avec son passé et son présent de musicien. «En tant que membre d’un groupe, c’était comme si j’en voulais tout le temps trop pour mon seul projet. Ce que j’aime c’est amener un projet de qualité à son plein potentiel.»

Pour lui, diriger un label c’est «une façon de ne pas travailler sur un seul projet d’art ou de musique mais bien une quinzaine, une vingtaine.»

Et il n’a jamais été déchiré entre ses deux rôles:

«Partir le label, ça m’a fait du bien dans mes ambitions. J’adore faire de la musique, j’adore enregistrer des albums et je le fais encore. Je veux jamais arrêter de faire de la musique. Mais je ne veux pas faire de la musique professionnellement. Je suis très satisfait avec le fait de pouvoir développer des bands à leur plein potentiel.»

«L’essence malgré la croissance…»

Rien ne semble arrêter Bonbonbon. Cette ascension fulgurante dans le paysage musical apporte son lot de «beaux problèmes.» Comme le commente Archambault: «La croissance, c’est l’affaire la plus tough. Le plus gros défi, c’est de garder l’essence malgré la croissance.»

Et comment cette essence originelle du label se définit-elle? «On doit garder notre volonté de créer un espace différent des autres pour la musique.»

Voilà pour l’essence. La croissance maintenant: «Mine de rien, c’est rendu qu’on gère 12 carrières. On est rendu avec 7 employés, 4 actionnaires, 3-4 pigistes, du monde qui voyage à l’international…»

«Let’s go! on le fait!»

Et est-ce que la sélection des artistes à intégrer à l’écurie a subi les contrecoups de cette croissance? «Au début, c’était simple. Tommy, Cynthia et moi disions: « C’est bon on aime ça! » Maintenant, tout le monde va travailler sur le projet. On réfléchit à plus de trucs dans l’ensemble.

Heureusement, les copains se gardent une place pour la spontanéité:

«Dernièrement, on a signé un band, Ada Oda. C’est un band belge qu’on écoutait depuis longtemps. Je m’en allais à South By Southwest et je me rends compte qu’ils allaient être là. On leur a écrit et ça a marché. On s’est dit «Let’s go! on le fait!» »

«Tu pourras jamais recréer l’authenticité et la vision d’un artiste…»

Ce succès de l’étiquette n’enfreint en rien la liberté artistique dont jouissent les poulains de Bonbonbon: «C’est pas mon rôle de dire à l’artiste comment gérer sa direction artistique. J’aime avoir des artistes qui ont une vision.»

S’il peut agir à titre de conseiller, Archambault s’en remet au bon jugement de ses chouchous: «Je laisse toujours le dernier mot à l’artiste. Tu pourras jamais recréer l’authenticité et la vision d’un artiste.»

«Si vous vous chantez en français, on va se démarquer…»

Souvent les ambitions internationales d’un groupe ou d’un chanteur riment une écriture dans la langue de Leonard Cohen. Démarche que ne conseille pas le label: «Au début, je disais aux musiciens: « Si vous vous chantez en français, on va se démarquer. » Parce que des Foxygen, des Lemon Twigs ou des Tame Impala en anglais, il y en a déjà 1000.»

Cette prise de parole qui pourrait sembler politique déborde sur l’esthétique: «Si tu le fais en québécois, tes accents toniques et ton langage vont être tellement différents que, musicalement, tu vas avoir une toune qui est complètement différente d’un autre artiste.»

Il cite Larynx (Alex Larin de son vrai nom), qui jouait autrefois dans la formation Rust Eden. «Ils ont rushé parce qu’ils chantaient en anglais. Je veux pas dire que c’était juste parce que c’était en anglais mais c’est tough. Quand Alex (Larin) a chanté en français, personne n’avait jamais entendu ça. Tout le monde a capoté sur son champ lexical.»

Cette philosophie, Archambault peut aussi la déployer en slogan: «Je suis fier d’où on vient. On produit de la musique de qualité internationale.»

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«Ça roule beaucoup!»

Parlons-en de l’international. Son poste de dirigeant de Bonbonbon a amené Alexandre Archambault à jouer les globe-trotters plus d’une fois:

Ça a commencé avec Vanille. On a eu la chance d’aller au festival Waves en Autriche. Le mois d’après, elle était invitée au MaMa en France au Francofaune en Belgique. Après à South By Southwest, au UK pour le Focus Wales et le Great Escape.

Cette année fructueuse en contacts a bénéficié à d’autres artistes du label. De sorte que Totalement Sublime et Arielle Soucy ont pu se faire entendre au South By Southwest de de cette année.

Et c’est pas fini: «Avec Rachel (Vanille), on retourne à Bourges en avril. Totalement sublime, eux, sont allés à Reeperbahn en Allemagne. Ça roule beaucoup!»

«On veut s’établir comme une des grandes maisons de disques au Québec…»

Bonbonbon entend bien souligner ses 5 ans d’existence avec, non pas avec un, mais bien 5 partys l’automne prochain. Archambault jubile en énumérant le tout: «Il va y avoir un party au FME, à M pour Montréal, un party de Noël, un party à Québec, un party aux Francos…»

Et pour cause: «On est fier de ce qu’on a fait en 5 ans et de ce qu’on a réussi à établir. On veut montrer au monde qu’on est là pour rester. On veut s’établir comme une des grandes maisons de disques au Québec pour les prochaines années.»

Bon 5e anniversaire et longue vie à Bonbonbon!


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