Tu ne mourras pas

Chronique

Pour son 3e album, la Québécoise Maude Audet évoque le temps qui passe, inexorablement ravageur. Mais la chanteuse n’est pas du genre à baisser les bras. Malgré la suavité apparente de sa musique et de sa voix, elle brandit les armes qui lui permettront de s’affranchir des effets délétères du temps. Sur une musique pop folk aux harmonies rassurantes et aux timbres enveloppants (piano, guitare, flûte, cordes), Demande-moi et Nos Bras lâches parlent de ce qui nous échappe, mais qu’on tente de rattraper au dernier moment. La voix est réverbérée, ce qui accentue la douceur de son timbre, mais aussi la force tranquille de son propos. Sous la mélancolie se cache toujours un certain optimisme chez Maud Audet. Le sourire qu’elle tient à afficher est particulièrement vivace dans la ritournelle lumineuse de Fille canon, avec son banjo, ses nappes de synthé artificiellement oniriques, et son faux air de chanson populaire des années 1970.

La production vintage de Mathieu Charbonneau fait également des merveilles dans Les Gelées de novembre, une chanson qui évoque une mère redoutant le moment où ses enfants voleront de leurs propres ailes. D’autres portraits féminins et sensibles jonchent cet album, en particulier Tu trembleras encore et Femme flamme. Dans les deux cas, ce sont des histoires de femmes tombées dans l’oubli que Maud Audet met en lumière, des femmes qu’elle tente de réhabiliter le temps d’une chanson. Et puisque l’on parle d’amour, celui-ci se répand (mais de manière contrariée) dans deux titres : l’amour qui arrive sur le tard dans Laura et celui qui arrive trop tôt dans Couteau de poche. Encore une fois, le temps vient contrarier les sentiments, jusqu’à la mort, inévitable. Mais malgré ce constat implacable, Maud Audet clame imperturbablement son désaccord : Tu ne mourras pas. ©Nicolas Magenham/Qobuz