Splinters from an Ever-Changing Face

Chronique

Si vous vous considérez comme le genre de metalleux avec des goûts trop raffinés pour écouter du metalcore, Splinters from an Ever-Changing Face, le dernier album de END, devrait être votre exception. Le supergroupe nord-américain propose un metal haute-fidélité intégrant des compositions sophistiquées que l’on pourra d’autant plus apprécier avec un équipement sonore de qualité, et nous offrant le carburant idéal pour maintenir une fosse de concert en ébullition constante. Le groupe est constitué du chanteur de Counterparts Brendan Murphy, de l’ancien guitariste de Shai Hulud Gregory Thomas, du bassiste de Reign Supreme Jay Pepito, de l’ex-batteur de Structures Andrew McEnaney et du leader/guitariste/producteur Will Putney. Chacun des membres a apporté ces quinze dernières années une contribution notable aux genres que sont le hardcore, le deathcore ou le metalcore et Splinters from an Ever-Changing Face sonne comme leur effort commun pour invoquer les aspects les plus extrêmes de leurs projets antérieurs respectifs.

McEnaney, le batteur talentueux et survolté de Structures, apporte son jeu impulsif dans une configuration ou chacun est à la pointe de son art. Les cris douloureux de Murphy étaient inscrits sur sa carte de visite à l’époque des plus mélodiques Counterparts mais ici, il hurle comme un démon et n’a jamais aussi bien sonné. Cependant, c’est la patte de Putney que l’on ressent le plus chez END. Quand il n’est pas le cœur du réacteur du groupe tech-deathcore Fit For An Autopsy, il est reconnu comme fin producteur et impliqué dans la naissance de disques chez certaines des plus importantes formations hardcore (Vein, Stick To Your Guns, Harms Way) et metalcore (Every Time I Die, Knocked Loose, The Ghost Inside) de la dernière décennie. Tout ce qu’il touche est impeccable, mais Splinters… pourrait bien être son chef-d’œuvre. Chaque élément du mix – guitares saturées, graves surpuissant, en passant par les cris d’outre-tombe – est à fond sans pour autant que le résultat final perdre en qualité. 

Cet album est sans aucun doute tributaire de la tradition metalcore, mais certains moments sont si heavy et sans concession qu’ils ouvrent la porte à d’autres styles. Covet Not et Absence vrombissent parfois si intensément qu’ils en deviennent presque black metal et certaines compositions comme Sands of Sleep tendent irrémédiablement vers le sludge. Bien des groupes mélangent l’énergie du hardcore avec la lourdeur du metal, mais cela faisait aussi bien longtemps qu’une formation n’avait été aussi remarquable dans cette démarche. © Eli Enis/Qobuz