Rathaus, Tiessen & Arma: Sonatas for Violin & Piano

Chronique

Avec ses deux œuvres enregistrées en première mondiale et la très rare Sonate pour violon et piano, Op. 14 du compositeur ukrainien Karol Rathaus (1895-1954), voilà un disque incitant à la découverte de nouveaux horizons musicaux. Rathaus fait partie des très nombreux artistes rejetés par le nazisme qui n’ont trouvé leur salut que dans l’exil. Cet élève de Franz Schreker a d’abord émigré à Paris avant de s’installer à New York où il vit en composant de la musique de films et en enseignant au Queens College où sont conservées ses partitions. Sa Sonate composée en 1925 est un mélange d’élégance viennoise et d’expressionisme allemand.

La violoniste Judith Ingolfsson et le pianiste Vladimir Stoupel poursuivent ce programme original avec Heinz Tiessen (1887-1971), un compositeur allemand très actif dans la propagation de la musique contemporaine dès les années 1920 durant lesquelles il est une des personnalités influentes de son temps. Sa musique est dirigée par Wilhelm Furtwängler à Berlin, alors que le violoniste Georg Kulenkampf et le pianiste Eduard Erdmann jouent sa musique de chambre. Sa Sonate en duo, Op. 35 de 1925 est construite sur une tonalité libre dans un climat expressioniste qui porte la marque de son auteur. Farouchement opposé à l’atonalité qui est selon lui « un déni fondamental aux relations harmoniques », Tiessen trouve son langage dans une tonalité flottante et une alternance entre tension et relaxation érigée comme une loi primordiale.

Derrière le pseudonyme du compositeur français Paul Arma (1904-1987) se cache en fait un compositeur hongrois, élève de Bartók, qui fuira lui-aussi le nazisme pour entrer dans la clandestinité avant de reparaître en France après la guerre où ses recherches sur le folklore français sont comparables aux études faites par Bartók et Kodály en Hongrie et en Roumanie. Ce surdoué laisse de nombreuses œuvres, dont cette Sonate pour violon et piano composée en 1949 et jamais publiée. D’une grande difficulté technique elle exhibe un fort tempérament et un grand souffle lyrique à travers une forme libre faisant penser à une longue improvisation. © François Hudry/Qobuz