Dodgson: 24 Inventions for Harpsichord

Chronique

Les 24 Inventions pour clavecin du compositeur britannique Stephen Dodgson (1924–2013) ont été composées sur une période de quelque quarante ans. Dodgson connaissait bien sûr les œuvres des « réinventeurs » du clavecin au XXe siècle, parmi lesquels Falla, Poulenc, Martin, Martinů, Henze ou Stravinski (dans son Rake’s Progress), puis assista au déclin de l’engouement des nouveaux compositeurs pour l’instrument – trop lié à un certain néoclassicisme qui avait vécu ? Le premier volume des Inventions de Dodgson, publié en 1955, était conçu pour le clavecin « moderne », de lourdes machines avec cadre métallique, mécanisme plus proche de celui du piano, sonorité très particulière. Le second volume de 1961, créé par Trevor Pinnock, le troisième en 1970 à une époque où l’on s’intéressait déjà de près aux instruments anciens eux-mêmes, le quatrième et dernier en 1990 quand le clavecin des années cinquante était lui-même devenu un instrument ancien… L’écriture de Dodgson, moderne dans l’harmonie et la rythmique, assez scarlattien dans la concision du propos et l’esprit parfois facétieux qui s’en dégage, permet à la claveciniste Ekaterina Likhina de nous offrir cette première mondiale discographique avec tout ce qu’il faut de joies, de peines, de rigueur et de liberté qu’exigent les partitions, très éclectiques dans leurs orientations. On notera que, plutôt que d’utiliser des clavecins modernes – en particulier pour les Inventions les plus anciennes, elle a préféré s’en tenir à un seul instrument pour les quatre volumes, un clavecin de l’époque baroque accordé à 415 Hz et selon un tempérament des années 1750. Car le compositeur, au long des années, avait pris l’habitude d’entendre ses Inventions en concert sur de tels instruments, selon ce diapason et ce tempérament, et appréciait fort la richesse sonore qui s’en dégageait. © SM/Qobuz