Colors (Picard Brothers Remix)

Chronique

Il n'avait pas pris le temps de savourer les trois Grammy Awards remportés pour l'album précédent, le mélancolique Morning Phase (2014), que Beck s'attelait déjà au suivant, qui l'aura longuement occupé après la divulgation de deux singles, « Dreams » en 2015 et « Wow » l'année suivante. Deux échantillons représentatifs de la couleur générale du présent album Colors et pourtant très éloignés de son prédécesseur. Deux morceaux dansants, pop et « feel good » comme le veut l'expression en vogue.

Passé par de multiples phases musicales depuis l'inoubliable révélation de Mellow Gold (1994), intégrant à son style nonchalant le folk, le hip-hop, le funk ou le rock plus dur, Beck n'avait toutefois pas retrouvé la touche magique de Odelay (1996) sur la longueur d'un album, sinon pour la pop baroque Sea Change (2002). Ce nouveau virage négocié avec le producteur pop par excellence Greg Kurstin, responsable de nombreuses productions à succès pour Adele, Sia ou P!nk, le voit diluer son talent d'auteur-compositeur dans des rengaines electro-pop faciles, glissant dans l'oreille sans laisser de traces profondes, à l'image de titres anodins comme « Square One » ou « Fix Me », relégués après le dynamique mais surchargé « Up All Night ».

Autant dire que l'affaire, après un démarrage sur les chapeaux de roue avec « Colors », sans doute le morceau le plus mémorable, ne tarde pas à montrer des faiblesses au fil de chansons aussi aimables qu'insipides (« Seventh Heaven », « Dear Life »), recouverts d'un rythme sans âme et d'effets dérisoires. Seulement, le talent de l'éternel jeune homme rayonne tant au détour de « I'm So Free » ou de « No Distraction » que le résultat s'avère plutôt mitigé que raté. À force de tester mille et un détails, le charme semble avoir disparu en cours d'élaboration. Si ce treizième album ne figurera probablement au rang de ses réussites passées, il lui permet d'accrocher à sa discographie une palette de sons inédite.

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