Vendredi 12 juin, Jordi Savall et son Concert des Nations et la Capella Reial de Catalunya feront raisonner les Vêpres de Monteverdi à Paris, Salle Pleyel. Il est peu dire que le maître de la viole de gambe a largement contribué à la redécouverte de la musique ancienne. Son enregistrement des Vêpres (1610) réalisé en 1988 avec la Capella Reial, ne connaît toujours pas d’équivalent dans la discographie.
Pour Jordi Savall, tout est indiqué dans le titre même du recueil adressé à la Beata Vergine : il s’agit d’une approche ponctuée de gradations sensibles, où fusionnent tous les effectifs (solistes, choristes et instruments), de l’imploration théâtrale à la béatitude, jusque dans les fastes éthérés du Magnificat final.
Vingt ans plus tard, la rigueur artistique de cette réalisation continue de captiver, Savall soulignant par la clarté de sa vision la troublante cohérence d’une œuvre dont la conception prête encore à d’innombrables hypothèses. Ainsi, dans la vaste fresque que constituent ses Vêpres, Monteverdi brise le cadre habituel de toute composition religieuse et, riche de l’expérience neuve de L’Orfeo, adopte les tournures de l’opéra et les combinaisons instrumentales de l’école vénitienne.
Si l’on en croit le compositeur lui-même, « ce sont les contrastes, plus que tout, qui nous touchent profondément » : il fera judicieusement alterner pages de grande ampleur et moments plus intimes. Ainsi, la subjectivité dramatique fait irruption dans le cadre liturgique. De fait, même si les Vêpres sont conformes au type de compositions sacrées que l’on interprétait alors à Saint Marc de Venise, Monteverdi réussit en quatorze grandes pièces, de dimensions et de formations diverses, une grandiose combinaison de tous les styles de l’époque et s’impose comme le principal artisan d’un bouleversement radical du langage musical.
