Paru il y a un peu plus de 20 ans, "Summerteeth", le 3e album étonnamment pop de la bande de Jeff Tweedy, ressort dans une indispensable Deluxe Edition. Un chef d'oeuvre à redécouvrir d'urgence.

Après un premier album de country alternative bien goûtue (A.M.) et un second – double – dans la veine d’Exile on Main Street des Rolling Stones (Being There), Wilco s'est amusé à brouiller les pistes avec Summerteeth, un chef-d’œuvre dévoilant la face nettement plus pop de ses leaders, Jeff Tweedy et Jay Bennett, avec harmonies luxuriantes, mélodies sucrées et instrumentation cinq étoiles.

Dans son excellente autobiographie publiée en 2018, Let's Go (So We Can Get Back): A Memoir of Recording and Discording with Wilco, Etc., Tweedy sera sans ambiguïté sur ce projet. « Ce disque était notre vision totale de la pop bubblegum et aussi en partie notre réaction contre cette étiquette de country alternative et rock roots liée à la scène No Drepression que les gens nous collaient. Ils nous voyaient avec cette palette d’influences et nous, dans nos têtes, savions que ça n’était pas que cela. Nous avions plein d’enregistrements non publiés qui ne ressemblaient pas du tout à ça. »

Wilco, 2. Shot In The Arm, 1999 Glastonbury Festival live

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Dès les premières mesures de Can’t Stand It qui ouvre Summerteeth, puis sur l’entêtant A Shot in the Arm gorgé de cordes, les ombres des Beatles, des Beach Boys ou du Todd Rundgren de Nazz sautent aux oreilles. Le mellotron de She’s a Jar ne fait qu’amplifier ce sentiment de changement de cap qui n’entache en rien l’écriture toujours aussi dense du binôme Tweedy/Bennett. La face solaire de la musique de ce troisième Wilco est surtout le contrepoint parfait aux paroles désabusées, nostalgiques voire maussades. « J'étais probablement malheureux comme jamais à l’époque, pas du tout sûr de moi, avec le mal du pays et à fond dans la drogue », confirmera Jeff Tweedy.

Un cocktail humain des plus amer pour un disque magistral prouvant que Wilco dépassait les frontières de l’americana, s’imposant comme un des plus grands groupes américains de sa génération. Constat tout aussi flagrant sur les essentiels Yankee Hotel Foxtrot (2001) et A Ghost Is Born (2004).

Wilco, I Can't Stand It, live on Later With Jools Holland

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Deux décennies plus tard, pour sa superbe Deluxe Edition qui vient de paraître, Summerteeth a été remastérisé (par le maître Bob Ludwig) et étoffé par de nombreux bonus. Prises alternatives (Viking Dan), versions alternatives (comme la Slow Rhodes Version du titre Summer Teeth) et démos passionnantes bien que réservées aux fans hardcore du groupe (No Hurry, I’ll Sing It montrent l’évolution des compositions et surtout leur richesse instrumentale. Autre bonus majeur, un concert inédit enregistré le 1er novembre 1999 à Boulder dans le Colorado durant lequel Jeff Tweedy, John Stirratt, Ken Coomer et Jay Bennett affichent une cohésion parfaite.

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