Chaque mois, la rédaction de Qobuz repère pour vous les sorties à ne pas manquer, dans tous les genres.

CLASSIQUE (Pierre Lamy)

Le 3 février, les fans de Steve Reich ont difficilement pu passer à côté d’une sortie événement chez Deutsche Grammophon. Après le prestigieux Kronos Quartet ou les solistes de l’Ensemble Intercontemporain, c’est au tour du jeune Mivos Quartet de s’attaquer aux œuvres du compositeur américain sur Steve Reich: The String Quartets. Pour la première fois, on aura l’occasion d’entendre, sur un même disque et par les mêmes interprètes, les trois quatuors du pape de la musique minimaliste : Different Trains, Triple Quartet et WTC 9/11. Une expérience à prolonger avec une interview exclusive du compositeur publiée dans nos colonnes prochainement. Ce mois est également l’occasion de mettre le piano à l’honneur : en récital solo avec Nikolai Lugansky (Rachmaminov: Etudes - Tableaux - 3 Pièces), mais aussi en concerto avec le magnifique disque Schumann de Beatrice Rana sous la direction de Yannick Nézet-Séguin, ou encore le 7e volume de la série de Jean-Efflam Bavouzet parue chez Chandos, Mozart: Piano Concertos, Vol.7 .

De son côté, Anthony Romaniuk fait littéralement exploser les limites de l’instrument avec Perpetuum explore sur six claviers différents des œuvres de Bach, Ligeti, Adams, Purcell, Satie ou Schubert. On retiendra aussi les très belles ballades néo-romantiques des Poemas Para Piano du compositeur brésilien Alexandre Guerra. Si vous êtes plus portés sur la musique ancienne, ne manquez pas chez Erato l’album très attendu de l’ensemble L’Arpeggiata et de sa fabuleuse directrice Christina Pluhar, Passacalle de la Follie, centré sur les airs de cours français de la fin du XVIe siècle, avec le contre-ténor Philippe Jaroussky en invité d’honneur. A noter également, le majestueux programme Scriabine donné par le Buffalo Philarmonic sous la baguette de JoAnn Falletta, et la guitare sensuelle et intimiste de Thibault Cauvin qui nous livre un récital Bach de haute volée.

WORLD (Stéphane Deschamps)

Commençons par un monstre sacré : le 8e volume de l’indispensable série The Montreux Years présente des morceaux joués à Montreux par Paco De Lucia en 1984, 2006 et 2012 (sortie le 24 février). Quant à Fidel Fourneyron, fidèle à son trombone, il n’aime rien tant que lui faire découvrir d’autres horizons que ceux du jazz. Après Cuba sur Que Vola, le voilà en Afrique de l’Ouest sur l’excellent Bengue (sorti le 3 février). Un album acoustique, roots et groovy, haletant et lumineux, où trombone, marimbas, balafons, percussions et voix inventent une nouvelle langue vivante.

Une dernière rencontre pour la route ? Abri Cyclonique, l’album gwoka très roots du chanteur percussionniste guadeloupéen Moïse Polobi, produit par Doctor L, qui apporte une touche futuriste à cette musique venue du fin fond de la forêt tropicale (sortie le 17 février).

RAP (Brice Miclet)

Parmi les grands héritiers de Young Thug, Shy Glizzy n’est certainement pas le plus connu. Mais sa propension à tordre sa voix grâce à un Auto-Tune réglé au plus sensible, exercice périlleux, ne fait que renforcer la puissance et le malaise (dans le bon sens du terme) de son deuxième album, Flowers.

Parmi les sorties hip-hop du mois, il ne fallait pas manquer non plus le POISON de Myth Sizer, entre beats bucoliques et flows lancinants, Wax Tailor, toujours fidèle à l’art du sampling sur sa nouvelle livraison Fishing for Accidents, sur lequel il laisse la place à la sérendipité, et bien sûr DJ Pone, de Birdy Nam Nam, qui revient avec 1978. Enfin, la grosse sortie rap français de février, c’est Niro avec Taulier, qui réunit des grosses têtes comme Sofiane Pamart, Niska ou Alpha Wann.

ELECTRO & REGGAE (Smaël Bouaici)

Le mois de février a démarré sur une note orientale, entre l’excellent troisième album d’Acid Arab, qui invite la crème des chanteurs de raï et ressuscite Rachid Taha le temps d’un morceau, et les débuts du producteur jordanien Toumba sur Hessle Audio. Son maxi Petals nous ramène aux origines du label anglais, de la bass music subtile et inspirée. Outre-Manche toujours, les pionniers de la rave Orbital sont de retour le 17 février avec Optical Delusion et une belle brochette d’invités, dont The Medieval Baebes, l’ensemble vocal féminin spécialisé dans la musique du Moyen Age (sic).

Pluie de stars aussi sur Cracker Island, le nouveau Gorillaz prévu le 24 février (une petite moitié est déjà écoutable), avec Thundercat, Tame Impala, Bad Bunny ou encore Beck. Enfin, le 24 aussi, ne manquez pas le premier album Qobuzissime de l’Américano-Coréenne Miss Gritt, Follow The Cyborg.

Côté reggae, Marcus Gad a sorti son album Ready For battle et il est encore temps de découvrir l’album The Kalling de Kabaka Pyramid, qui vient de remporter le Grammy 2023 du genre.

BLUES/COUNTRY/FOLK (Stéphane Deschamps)

Pour le blues, notre cœur fait boum. Hommage et honneur donc à John Lee Hooker, dont le séminal album Burnin’ est réédité en version augmentée pour fêter les 60 ans de sa sortie. Entre autres perles de boogie-blues, on y entend la première version du fameux Boom Boom. Descendant du blues, le Californien Fantastic Negrito est de retour avec un album acoustique, Grandfather Courage, qui présente une autre facette de l’énervé chanteur. Ensuite, et elle pourrait être la sœur jumelle de Fantastic Negrito, la Nashvillienne Sunny War réussit avec Anarchist Gospel un parfait alliage de folk, de blues et de soul.

Enfin, c’est de France qu’arrive le meilleur album de musique typiquement américaine – la country – du moment : Chérie, de Theo Lawrence. Après avoir honoré la soul, le Bordelais recrée la magie du Nashville Sound des années 60 (la country de crooner arrosée de chantilly), comme aucun Américain n’ose plus le faire.

METAL (Maxime Archambaud)

Dire que les Autrichiens de Russkaja nous manqueront est un doux euphémisme. Uniques en leur genre, peut-être trop, les maestros de la polka sauce ska ont pris la décision de se séparer après nous avoir livré Turbo Polka. Dernier album sorti en ce début février. Les Suédois d’In Flames reviennent avec leur quatorzième album, Foregone, le meilleur depuis trop longtemps, tandis que les Winery Dogs continuent de servir leur classic rock intello, toujours efficace, sur III. Paramore signe son retour cinq ans après avec This is Why, tandis que les proto-Nickelback de Godsmack font eux aussi leurs adieux avec Lightning Up The Sky, beau pot-pourri metal alternatif saupoudré de grunge de la carrière des Américains.

ROCK (Charlotte Saintoin)

Février, mois gris, mois punk ? Avec Pink Colour Surgery, les Psychotic Monks font gicler la couleur. Radicaux dans leur troisième long format de quasi une heure, les enfants terribles de Saint-Ouen caressent les frontières de la noise en jouant sur les saturations. A l’inverse, au summum de la douceur, il y a Norm, 12 miniatures pop-folk de toute beauté truffées de gimmicks imparables, composées par le génial songwriter canadien Andy Shauf. La perle du mois pour les cœurs tendres.

Enfin, les vétérans jamais has been Yo La Tengo sortent l’excellent This Stupid World aux longues plages nébuleuses, entre shoegaze et expérimentations. Côté gras et heavy, les imprononçables Pigs x7 sont tous riffs dehors avec l’attendu Land Of Sleeper toujours chez l’excellent label Rocket Recordings. On finira à l’opposé avec l’hyperpop de la prolifique Caroline Polachek concentrée dans Desire, I Want To Turn You, de passage à Pleyel le 18 février.