Krystian Zimerman
Ce grand pianiste polonais est connu pour son art autant que pour son perfectionnisme intransigeant. Il ne se déplace qu’avec ses pianos, son camion et son équipe technique. On dit qu’il est capable non seulement d’accorder, de démonter et de remonter un piano, mais aussi d’en construire un lui-même de A à Z. A la suite d’incidents peu clairs, sa maison à New York, son studio de travail, son garage et ses pianos ont brûlé, un autre de ses pianos a été détruit par les agents de sécurité de l’aéroport JFK parce qu’il sentait un peu trop la colle. Il faut dire que Krystian Zimerman a désavoué publiquement la politique américaine à plusieurs reprises, protestant contre la guerre en Irak, contre le bouclier antimissile en Pologne et s’insurgeant contre la militarisation galopante de la sécurité dans les aéroports. Ces évènements l’ont décidé à ne plus retourner aux Etats-Unis.
Catapulté sur le devant de la scène musicale à la suite de son Premier Prix au Concours Chopin de Varsovie, en 1975, Krystian Zimerman ne se laisse pas tourner la tête par le succès. Il se retire de la scène pour mieux s’investir dans l’approfondissement de son répertoire. Sa rencontre avec son compatriote Arthur Rubinstein reste un des plus grands souvenirs de sa vie. Refusant les interviews et le jeu médiatique, il est un des rares solistes à travailler à la fois avec Karajan et avec Bernstein, les deux grands chefs des années soixante-dix qui avaient leur cercle d’habitués à la manière de clans rivaux. Inutile de lui demander pour qui va sa préférence. « Il n’y a pas plus différents » dit-il simplement. La précision pour Karajan, l’émotion pour Bernstein. Il a appris de l’un comme de l’autre. Deux manières peut-être de concilier les contraires de son propre caractère.
Jouer comme si sa vie en dépendait. Un postulat qui résume bien les aspirations de cet homme hors du commun. « Très souvent, en tant que pianiste, on fait des sons. Certains d’entre nous, plus professionnels, arrivent à faire de la musique. » Les exigences de Krystian Zimerman atteignent aussi sa vie privée. Chez-lui, il n’a pas de lit et il dort là où il peut, sur un canapé, dans son studio ou dans les cabanes qu’il construit dans les arbres de son jardin bâlois où il vit avec sa femme et ses enfants. Il y a une dimension shakespearienne dans cet être qui a du Timon d’Athènes en lui.
Mais qu’en est-il de son jeu ? Sa matière sonore est souvent superbe, son discours musical pas toujours exempt de maniérismes, mais c’est un pianiste qui parle, qui dit constamment quelque chose. Son répertoire ? Chopin bien sûr, et le romantisme d’une manière générale, Schubert, Brahms, Rachmaninov. Il aime aussi les couleurs de Debussy et de Ravel et a enregistré deux fois le très beau Concerto écrit pour lui par son ami Witold Lutosławski. Fidèle à DG depuis ses débuts, Zimerman aime peu ses disques qui enchantent pourtant ses fans. Il n’a enregistré qu’avec les plus grands : Bernstein, Karajan, Giulini, Ozawa, Boulez, Rattle. Les œuvres qu’il joue en public sont sans cesse remises sur le métier pour être polies et parfaitement assimilées. Il avoue jouer 1% de son répertoire et aborde des œuvres nouvelles qu’avec circonspection. La soixantaine arrivée, il vainc son stress en sortant de son silence discographique avec ce nouvel album, paru en automne 2017, consacré aux deux dernières Sonates de Schubert. L’Andante sostenuto de la D 960 fait froid dans le dos, c’est un chant d’errance et de solitude. Les tourments du pianiste s’ajoutent ici aux doutes existentiels du compositeur. Dans le finale le sourire n’est jamais loin des larmes. Un Schubert différent, déroutant, humain mais déjà si loin du monde…
© FH – décembre 2017 /Qobuz
Lire aussiCe grand pianiste polonais est connu pour son art autant que pour son perfectionnisme intransigeant. Il ne se déplace qu’avec ses pianos, son camion et son équipe technique. On dit qu’il est capable non seulement d’accorder, de démonter et de remonter un piano, mais aussi d’en construire un lui-même de A à Z. A la suite d’incidents peu clairs, sa maison à New York, son studio de travail, son garage et ses pianos ont brûlé, un autre de ses pianos a été détruit par les agents de sécurité de l’aéroport JFK parce qu’il sentait un peu trop la colle. Il faut dire que Krystian Zimerman a désavoué publiquement la politique américaine à plusieurs reprises, protestant contre la guerre en Irak, contre le bouclier antimissile en Pologne et s’insurgeant contre la militarisation galopante de la sécurité dans les aéroports. Ces évènements l’ont décidé à ne plus retourner aux Etats-Unis.
Catapulté sur le devant de la scène musicale à la suite de son Premier Prix au Concours Chopin de Varsovie, en 1975, Krystian Zimerman ne se laisse pas tourner la tête par le succès. Il se retire de la scène pour mieux s’investir dans l’approfondissement de son répertoire. Sa rencontre avec son compatriote Arthur Rubinstein reste un des plus grands souvenirs de sa vie. Refusant les interviews et le jeu médiatique, il est un des rares solistes à travailler à la fois avec Karajan et avec Bernstein, les deux grands chefs des années soixante-dix qui avaient leur cercle d’habitués à la manière de clans rivaux. Inutile de lui demander pour qui va sa préférence. « Il n’y a pas plus différents » dit-il simplement. La précision pour Karajan, l’émotion pour Bernstein. Il a appris de l’un comme de l’autre. Deux manières peut-être de concilier les contraires de son propre caractère.
Jouer comme si sa vie en dépendait. Un postulat qui résume bien les aspirations de cet homme hors du commun. « Très souvent, en tant que pianiste, on fait des sons. Certains d’entre nous, plus professionnels, arrivent à faire de la musique. » Les exigences de Krystian Zimerman atteignent aussi sa vie privée. Chez-lui, il n’a pas de lit et il dort là où il peut, sur un canapé, dans son studio ou dans les cabanes qu’il construit dans les arbres de son jardin bâlois où il vit avec sa femme et ses enfants. Il y a une dimension shakespearienne dans cet être qui a du Timon d’Athènes en lui.
Mais qu’en est-il de son jeu ? Sa matière sonore est souvent superbe, son discours musical pas toujours exempt de maniérismes, mais c’est un pianiste qui parle, qui dit constamment quelque chose. Son répertoire ? Chopin bien sûr, et le romantisme d’une manière générale, Schubert, Brahms, Rachmaninov. Il aime aussi les couleurs de Debussy et de Ravel et a enregistré deux fois le très beau Concerto écrit pour lui par son ami Witold Lutosławski. Fidèle à DG depuis ses débuts, Zimerman aime peu ses disques qui enchantent pourtant ses fans. Il n’a enregistré qu’avec les plus grands : Bernstein, Karajan, Giulini, Ozawa, Boulez, Rattle. Les œuvres qu’il joue en public sont sans cesse remises sur le métier pour être polies et parfaitement assimilées. Il avoue jouer 1% de son répertoire et aborde des œuvres nouvelles qu’avec circonspection. La soixantaine arrivée, il vainc son stress en sortant de son silence discographique avec ce nouvel album, paru en automne 2017, consacré aux deux dernières Sonates de Schubert. L’Andante sostenuto de la D 960 fait froid dans le dos, c’est un chant d’errance et de solitude. Les tourments du pianiste s’ajoutent ici aux doutes existentiels du compositeur. Dans le finale le sourire n’est jamais loin des larmes. Un Schubert différent, déroutant, humain mais déjà si loin du monde…
© FH – décembre 2017 /Qobuz
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