Le grand organiste français Jean Guillou a annoncé qu’il n'accepterait pas la Légion d’honneur, pour protester contre le manque de visibilité de la musique classique en France.

D’après l’AFP, l'organiste et compositeur Jean Guillou, 80 ans, a fait savoir aujourd’hui qu'il refusait la Légion d'honneur, « à l'heure où la musique dite savante ou classique voit sa place diminuée par toutes les instances officielles ».

« Découvrant avec stupeur son nom parmi la promotion du 14 juillet de la Légion d'honneur », le musicien, nommé chevalier, « a pris la décision de refuser cette distinction qu'il n'a jamais sollicitée », écrit dans un communiqué l'association « AUGURE-Autour de Jean Guillou », porte-parole de l'artiste.

« Il lui apparaît que sa dignité de musicien impose de repousser cet accessoire honorifique », poursuit cette association assurant la promotion de l'œuvre et des activités de Jean Guillou, titulaire depuis 1963 du grand orgue de l'église Saint-Eustache à Paris. « Son indépendance viscérale l'a toujours maintenu hors des circuits officiels, et l'ironie veut que l'Etat lui confère un brevet de reconnaissance à l'occasion de ses 80 ans, comme si son talent se trouvait majoré par ce chiffre rond », ajoute le texte signé par la présidente de l'association, la musicologue Sylviane Falcinelli.

« Mais la seule consécration qui vaille pour un artiste est la diffusion publique des fruits les plus innovants de son imagination : or on continue d'ignorer dans les cités françaises ses compétences organologiques - alors que l'Europe se couvre d'instruments originaux conçus par lui -, et les programmations des scènes nationales tardent à reconnaître la diversité de son œuvre de compositeur, pourtant accueillie dans les grandes salles de concert étrangères », poursuit-on de même source.

Personnalité excentrique au meilleur sens du terme, baroque, même, si les mots ont un sens, Jean Guillou est une figure mondiale de l'orgue, fêtée sur tous les continents, un improvisateur hors-pair et un compositeur prolixe. Il a fêté ses 80 ans en avril sans le moindre concert organisé en France en son honneur.

Il n’est pas, rappelons-le, le premier compositeur à refuser la Légion d’honneur. Maurice Ravel avait fait de même en 1920, sans donner de raison. Ce qui lui avait valu ce fameux commentaire extrêmement méchant et injuste de Satie : « Ravel refuse la Légion d’honneur, mais toute sa musique l’accepte ».

La musique de Jean Guillou n'accepte pas non plus la Légion d'honneur, donc. Question aux lecteurs : saurez vous lister les organistes qui ne l'ont pas refusée ? Allez, on commence par un nom : Jacques Taddei. La suite ?

Le site de Jean Guillou