Dotée d’une voix puissante, profonde et émouvante, la cantatrice française, voix majeure du XXe siècle, s’est éteinte à 94 ans.

Denise Scharley est décédée le 26 juillet à Versailles. Grande tragédienne du XXe siècle, la cantatrice française était âgée de 94 ans. Durant quarante ans, elle chantera aussi bien Wagner, Bizet, Massenet, Saint-Saëns, Gluck, Prokofiev, Rameau, Debussy, Tchaïkovski, Moussorgski, Stravinski et Verdi que Poulenc, Menotti, Honegger et Milhaud. Engageant sa carrière en 1943, Scharley s’était retirée en 1983.

Née le 15 février 1917, Denise Scharley sort du Conservatoire de Paris, en 1942, avec trois prix sous le bras. Quelques semaines plus tard, elle fait ses débuts sur la scène de l’Opéra-Comique dans Pelléas et Mélisande. En 1951, c’est cette fois la scène de l’Opéra de Paris qui l’accueille dans Rigoletto. Garnier où elle chantera les principaux rôles de mezzo ou contralto. Le 21 juin 1957, Scharley crée le rôle de Madame de Croissy, Première Prieure des Dialogues des carmélites de Poulenc. Elle est aussi Madame Flora dans The Medium (1946) de Menotti, à Marseille d'abord en 1961, Salle Favart ensuite.

Au sein des artistes lyriques français, Denise Scharley occupa une place de premier plan. De Dalila à Carmen, de Charlotte à Dulcinée ou Geneviève, elle s'est imposée sur toutes les scènes dans le grand répertoire. Dès la fin de la guerre, elle se produit de Suisse en Hollande, d'Angleterre en Belgique, en passant par l’Espagne et l'Allemagne. L'Italie la réclame aussi, Naples, Bologne, Rome pour Pelléas et Mélisande, puis Carmen en 1947, aux côtés de Mario Del Monaco, partenaire qu'elle retrouve, en 1960, pour Samson et Dalila au Palais Garnier.

Son mariage avec Jacques Hivert, baryton de l'Opéra-Comique, et la naissance de deux enfants en 1948 et 1949, l'ayant temporairement éloignée de la scène, elle quitte Favart pour la Monnaie de Bruxelles. Année durant laquelle elle est titulaire du rôle de Carmen et qui précède son engagement à l'Opéra de Paris en 1951.

Son parcours est impressionnant et les grands rôles s’enchainent : Amnéris, Mary du Vaisseau fantôme, Carmen dans la production de Raymond Rouleau, Ulrica du Bal masqué (de 1958 à 1966) auprès de Régine Crespin ou Jon Vickers. De Wagner, outre Mary, Denise Scharley chantera Fricka de La Walkyrie, Erda de Siegfried, la Première Norne du Crépuscule des Dieux (avec Régine Crespin et Rita Gorr) dans la Tétralogie, dirigée en 1958, par Knappertsbusch…

Lors de la création d'Obéron de Weber à Paris en 1954, elle deviendra Puck, sous la baguette de Cluytens, puis le jeune David, lors de la présentation scénique de l'œuvre sacrée d'Honegger, Le Roi David en 1960. En 1972, elle sera à nouveau Madame de Croissy dans la nouvelle production des Dialogues des carmélites, signée Raymond Rouleau. À Genève, Denise Scharley aura eu aussi l'occasion d'aborder le répertoire russe avec La Dame de pique et La Khovantchina. C'est en 1983, après une série de représentations de Ondine de Daniel-Lesur au Théâtre des Champs-Elysées, que la cantatrice se retire en prêtant sa voix inaltérée à une série de représentations de Faust au Théâtre de la Halle aux Grains, à Toulouse, mettant un terme à quarante années au service du chant.

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