Du 8 au 13 février, un cycle «Jazz mystique» transformera la Cité de la Musique en grande église post-coltranienne…

Le jazz aussi a connu des tendances mystiques : que ce soit dans la lignée de Saint John (Coltrane), dans le sillage des œuvres sacrées de Duke Ellington ou à la manière singulière de Sun Râ. Du 8 au 13 février, la Cité de la Musique au Parc de la Villette à Paris proposera une série de concerts célébrant ce mysticisme conjugué à l’improvisation jazz. Un cycle réunissant des noms aussi prestigieux que Magma, Marc Ribot ou bien encore le Sun Râ Arkestra. Demandez le programme :

Vendredi 8 février, 20h

Saint John Coltrane Church Archbishop Franzo King

L’archevêque Franzo Wayne King dit avoir eu la révélation du caractère divin de la musique de John Coltrane lors d’un concert en 1965. En 1971, à San Francisco, il fonda la Saint John Coltrane African Orthodox Church, vouée à exalter cette dimension spiritualiste de l’art du saxophoniste et compositeur, entendu comme louange du Créateur.

Pour le révérend King, qui fut proche des Black Panthers, l’élévation de l’âme n’est pas dissociable de l’engagement humanitaire et politique. Plus de trente-cinq ans après sa création, la congrégation dirigée par le saxophoniste-archevêque reste fidèle à sa mission prosélyte : «amener des âmes au Christ» par l’intermédiaire du génie de son saint patron, John Coltrane, considéré comme un intercesseur entre le monde des hommes et le Royaume céleste. Les membres de la congrégation réinventent sa musique dans des rituels liturgiques et festifs, teintés de gospel et mêlés de prêches évangélistes.

Archbishop Franzo King direction, saxophone Reverend Max Hoff, Roberto de Haven, Franzo King saxophones Frederick Harris piano Nicholas Baham guitare Clarence Stephens, Wanika Stephens basses nn batterie Reverend Mother Marina King, Reverend Sr Makeda King Nueckel, Reverend Sr Lavette King, Cartier King, Angela Baham, Anne Mack, Reverend Sr Erinne Johnson, Hallie Greene, Desiree Mc Closkey voix

Samedi 9 février, 15h

Forum Le jazz mystique En 1964, John Coltrane composait A Love Supreme, hymne à l'amour divin dans lequel sa recherche musicale se doublait d'une quête spirituelle. Souvent occulté par une critique profane, ce rapport à la foi vécue comme absolu a été partagé par nombre de musiciens, notamment à l'heure du free jazz, jusqu'à influer sur la forme de leur discours. Outre qu'il renvoie à l'environnement social du musicien afro-américain, cet engagement inscrit dans l'œuvre amène à s'interroger sur les correspondances que, dans le jazz, le mystère de la foi peut entretenir avec le mystère de la musique.

15H : conférence, table ronde Vincent Bessières, animateur, journaliste Vincent Cotro, enseignant-chercheur en musicologie Raphaël Imbert, musicien et compositeur

17h30 : Concert Brotherhood Consort Raphaël Imbert, saxophones, direction Thèmes de John Coltrane, Albert Ayler, Pharoah Sanders

Samedi 9 février, 20h

Hommage à Albert Ayler Né à Cleveland en 1936 et mort à New York en 1970, le saxophoniste Albert Ayler a développé un style d’improvisation qui a longtemps choqué, tel un flot d’associations libres. Ce compagnon de route de Cecil Taylor est l’un des pères du free-jazz, notamment avec son album de 1964, Spirits. Dans les dernières années de sa vie, Ayler a tenté d’intégrer des influences pop, soul ou funk. C’est de cette période que le saxophoniste Laurent Bardainne s’est inspiré pour Here Is To You, Albert Ayler!, ensemble d’arrangements orchestraux tournés vers les musiques amplifiées actuelles. Spiritual Unity, qui fut d’abord le titre d’un album d’Albert Ayler en 1965, est aujourd’hui le nom de l’orchestre d’improvisation collective né de la rencontre entre Marc Ribot, qui sait traduire à la guitare le son écorché du saxophone free, et le contrebassiste Henry Grimes.

Première Partie: "Here is to you, Albert Ayler" Laurent Bardainne saxophone ténor Dean Bowman voix Nicolas Villebrun guitare Mami Chan clavier Arnaud Roulin claviers Vincent Taeger batterie

Seconde Partie : Marc Ribot "Spiritual Unity" Marc Ribot guitare Roy Campbell Jr trompette Henry Grimes contrebasse Chad Taylor batterie

Lundi 11 février, 20h

Magma

Le groupe Magma a été fondé en 1969 par le compositeur, batteur et chanteur Christian Vander. Deux ans après la mort de John Coltrane, donc, pour qui Christian Vander a une admiration sans bornes. Sa musique – qui marie des influences aussi diverses que Stravinski, le free-jazz et le rock d’avant-garde de Zappa –, Christian Vander l’a baptisée zeuhl : mot inventé d’une langue imaginaire (le kobaïen), pour signifier une «musique céleste». Car tel est le but vers lequel Magma ne cesse de tendre : un état vibratoire en perpétuel renouvellement. Au cours de sa carrière sinueuse, ponctuée de tournants plus commerciaux marqués par le funk, le groupe aura accueilli des musiciens comme Didier Lockwood ou Michel Grailler. Refusant les identités hiérarchiques, allant jusqu’à réinventer les noms de ses musiciens, Christian Vander voit avant tout la musique comme une matière : « même si, pour beaucoup, elle demeure abstraite parce qu’on ne la voit pas et qu’on ne peut la palper, elle existe ».

Christian Vander batterie, chant Stella Vander percussions, chant Isabelle Feuillebois chant Himiko Paganotti chant Antoine Paganotti chant James Mc Gaw guitare Emmanuel Borghi piano Fender Philippe Bussonnet basse Benoit Alziary vibraphone

Mercredi 13 février, 20h

Musique sacrée / Jazz cosmique

Première partie : Duke Ellington's Sacred Music Compagnie Nine Spirit Raphaël Imbert saxophones, direction Thomas Savy saxophones, clarinettes Christophe Leloil trompette Emile Atsas guitare Carine Bonnefoy piano Hubert Rousselet contrebasse Mourad Benhammou batterie Jean-Luc Difraya percussions, chant Marion Rampal chant

Peu de gens savent que, dans les dix dernières années de sa vie, Duke Ellington a composé de la musique sacrée. Ainsi présentait-il, le 6 septembre 1965, un concert pour l’achèvement et la consécration de la Grace Cathedral de San Francisco. C’est ce répertoire, entre tradition afro-américaine et liturgie européenne, que la compagnie Nine Spirit, dirigée par le saxophoniste et arrangeur Raphaël Imbert, s’attache à réhabiliter.

Seconde partie : Sun Râ Arkestra Marshall Allen direction, saxophone, flûte Art Jenkis voix Elson Nasciemento percussions Yahya Abdul Majid saxophone Knoel Scott saxophone Fred Adams trompette Luqman Ali batterie Juini Booth contrebasse

Le Sun Râ Arkestra est né lorsque son fondateur, Herman Blount (1914-1993), décida de changer de nom, sous l’influence de ses études égyptologiques et de son adhésion à une société secrète de Chicago, qui pratiquait l’occultisme tout en défendant une sorte de nationalisme des Noirs. En 1952, se proclamant de race angélique plutôt qu’humaine, se voyant comme un intermédiaire cosmique apportant le message du Créateur sur la terre, Blount se fit appeler Sun Ra, comme le dieu égyptien du soleil. Et son orchestre devint l’Arkestra… Le répertoire de cette formation a changé au fil des décennies. On l’entend passer du rhythm’n’blues et du cool jazz de ses débuts au surprenant mélange de A Call For All Demons (1956), sorte de free mambo fait de rythmes latins et d’improvisations atonales. L’album The Heliocentric Worlds of Sun Ra (1965) donne libre cours à la tendance free jazz et à l’exploration des timbres, entre percussions et claviers électriques. Tandis que les années soixante-dix sont marquées par un retour au jazz et au blues traditionnels, mais avec des danseurs, des acrobates et des jongleurs venant se joindre aux musiciens. Après des tentatives ponctuelles en direction de la soul ou du disco, les années 80 seront aussi celles des hommages, que ce soit à Billie Holiday ou aux personnages de Walt Disney. Cet orchestre historique, mais protéiforme et toujours plein de surprises, survit brillamment à la disparition de son fondateur, sous la direction du saxophoniste Marshall Allen, qui en est membre depuis 1958.

Le site officiel de la Cité de la Musique

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