Du 5 avril au 19 juin, à l’Ircam et au Centre Pompidou, trois concerts et une conférence souligneront les correspondances entre le peintre russe et le compositeur autrichien.

Dans le cadre de l’exposition Vassily Kandinsky qui se tiendra au Centre Pompidou à Paris du 8 avril au 17 août, trois concerts et une conférence s’intéresseront aux correspondances entre Kandinsky et Schönberg.

Tout d’abord dimanche 5 avril, à 11h30, dans la petite salle du Centre Pompidou, une conférence d’Esteban Buch intitulé Die glückliche Hand d’Arnold Schönberg/ La Sonorité jaune de Vassily Kandinsky lancera cet alléchant cycle. Schönberg à propos de La Sonorité jaune de Kandinsky (août 1912) : « C'est exactement ce que j'ai cherché à réaliser dans ma « Main heureuse »… Il est important que nous employions notre faculté créatrice à imaginer des énigmes analogues à celles qui nous entourent. Afin que notre âme tente — non de les résoudre — mais de les déchiffrer. »

Quelques jours plus tard, jeudi 9 avril, à 20h, dans l’espace de projection de l’Ircam, aura lieu le concert Sprechcantando.

Ce soir-là, Raphaële Kennedy (soprano), Isabelle Menke (voix), Brice Martin (basson), Julien Le Pape (piano), l’ensemble TM+ dirigé par Laurent Cuniot, et Manuel Poletti (réalisation informatique musicale) offriront au public des œuvres signées Luigi Nono (…Sofferte onde serene…), Andrea Vigani (création mondiale de Tagli, pour voix de femme, fagott, trio à cordes, piano, vibraphone et électronique) et Arnold Schönberg (Pierrot lunaire)…

Parlé ou chanté, le Pierrot lunaire de Schönberg n'a jamais levé l'ambiguïté du « Sprechgesang », autorisant par là même une multitude d'interprétations. C'est la version cabaret que propose Isabelle Menke, actrice habituée du théâtre de Christoph Marthaler. Parlé ou chanté, la création d'Andrea Vigani s'élance sur la fragmentation entre son et sens. À partir d'un texte de Saint Augustin sur la notion de vérité, le compositeur italien interroge la réalité de notre perception. Le sens musical se divise (Tagli) entre la voix et le basson pour se recomposer ensuite grâce à la projection spatiale. En introduction à cet enjeu spatial et musical ...Sofferte onde serene... de Nono. Le piano réel se heurte ici au piano enregistré de Maurizio Pollini, les deux réalités se troublant mutuellement frappent la coque d'un bateau sur la lagune vénitienne.

Samedi 23 mai, à 20h, dans la grande salle du Centre Pompidou, se produiront les Solistes de l'Ensemble intercontemporain avec un programme Liszt, Webern, Bach, Scriabine, Pesson, Stravinsky et Schönberg.

« Les œuvres qui nous hantent, confiait Gérard Pesson, s’interposent lorsqu’on croit avoir tiré une idée du néant. » Miroir de ce qui la précède, l’entoure ou l’engendre, l’œuvre ne naît pas par accident. Les voies nouvelles de la Bagatelle sans tonalité, valse méphistophélique de Liszt, furent ainsi préparées par toute une génération romantique. Malgré un titre évoquant Beethoven, la désintégration mélodique des Six Bagatelles de Webern n’aurait pas été possible sans une connaissance approfondie du contrepoint de Bach : « c’est là qu’il faut chercher ce que la composition avec douze sons apporte de plus, en regardant en arrière vers ce qui l’a précédée. » Bach encore, dans les quatre notes du Quatuor op. 28, ou dans la polyphonie fuguée de l’Elégie de Stravinsky. Des modèles plus ou moins masqués, tels ces archétypes classiques réinventés par Schönberg au contact des durées et effectifs réduits de la Symphonie de chambre, avant que la Messe noire de Pesson ne retrouve, à travers la Sonate de Scriabine, une Russie devenue folle et s’essayant aux rituels sataniques.

Ce cycle se terminera vendredi 19 juin, à 21h, toujours dans la grande salle du Centre Pompidou, avec un concert du Quatuor Arditti, de la soprano Barbara Hannigan, de Gilbert Nouno et Stefan Tiedje à la réalisation informatique musicale. Au programme de ce événement, la création mondiale de Oper-spective Hölderlin, pour soprano, quatuor à cordes et électronique de Philippe Schoeller, le Quatuor à cordes n°2, op. 10, pour soprano et quatuor à cordes de Schönberg et la création mondiale d’ Erinnerung, pour quatuor à cordes et électronique de Denis Cohen.

« Je respire l’air d’autres planètes ». L’injonction du poème de Stefan Georg mis en musique par Schönberg dans son deuxième quatuor évoque irrésistiblement la suspension de la tonalité et le cheminement parallèle de l’artiste proche du compositeur, Kandinsky, vers l’abstraction. C’est au Schönberg des pièces pour orchestre que fait signe le Erinnerung de Cohen, se souvenant de l’accord de Farben. L’ultime œuvre du programme reprendra la formation originale de l’opus 10 de Schönberg, ce mariage rare entre la voix et le quatuor, avec l’adjonction ici de l’électronique.

Après Feuillages et Vertigo Apocalypsis, réalisés à l’Ircam, cette création de Schoeller clôt le cycle consacré à l'interaction musicien vivant/haut-parleur. Oper-spective Hölderlin explore l'invention scénique selon les potentialités de la profondeur de champ, de l'horizon virtuel ou de l'ouverture dynamique de scène frontale qu'offre la WFS (Synthèse de front d’ondes), cet extraordinaire et nouvel instrument de projection de l'énergie sonore.

A noter que les trois concerts seront enregistrés par France Musique. Celui du 9 avril sera retransmis le soir même à 22h30 dans l’émission XXe parallèle présentée par Olivier Bernager. Et Lionel Esparza consacrera son émission Le Magazine du 9 avril de 18h à 19h30 à ce concert.

Le site officiel du Centre Pompidou

Le site officiel de l’Ircam