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Lou Reed

Comme toutes les figures majeures d’un genre, Lou Reed fut un genre à lui seul. Un être assez complexe. A l’ego surdimensionné. Mais au génie certain… Il y eu d’abord ce Velvet Underground, plus influent ces vingt dernières années qu’en son temps à la fin des années 60. Ce premier album à la banane produit par Andy Warhol, désormais considéré comme l’un des plus grands disques de l’histoire et qui ne se vendit qu’à une poignée d’exemplaires à sa sortie en 1967… Puis cette carrière solo qui, bien qu’inégale, laissera parmi les chansons les plus belles de toute l’histoire de la musique populaire du XXe siècle. Lou Reed était une voix. Un chant quasi parlé. Reconnaissable dès la première syllabe. Une approche basique, épurée et simple du rock’n’roll, sans arrangements maniérés, ni instrumentation gratuitement sophistiquée. Une plume surtout. Alors que les fleurs et le positivisme hippy sont à la fête tout au long des années 70, le Lou alcoolique, drogué et bisexuel préfère hurler le quotidien de sa ville, New York, ses trottoirs crades, ses putes de seconde zone, ses junkies en phase terminale, ses artistes obscurs, bref tous ces vers qui quadrillent la Grosse Pomme. Certains feront de ce poète urbain une sorte de parrain du mouvement punk, parenté qu’il ne cessera évidemment de railler…




Né Lewis Allan Reed le 2 mars 1942 à Brooklyn, Lou Reed grandit à Long Island, passionné de rock’n’roll (Chuck Berry en tête) et surtout de doo-wop, ce style vocal pour garçon-coiffeur très en vogue dans les banlieues new-yorkaises. Avec sa guitare, il se produit avec divers groupes au collège puis au lycée. En 1956, ses parents inquiets de sa bisexualité lui font subir des séances d’électrochocs, espérant le faire revenir dans le droit chemin… Quatre ans plus tard, Lou Reed entre à l’Université de Syracuse où il croise le poète Delmore Schwartz, rencontre on ne peut plus influente. En 1964, il trouve un premier emploi de songwriter au sein du label Pickwick à New York. Là, il fait la connaissance d’un certain John Cale, jeune Gallois venu à Manhattan pour étudier aux côtés du compositeur expérimental La Monte Young. Les deux hommes s’associent au guitariste Sterling Morrison et à la batteuse Maureen Tucker : le Velvet Underground est né.




Son nom commence à circuler sur la petite scène du Lower East Side de Manhattan et atteint les oreilles d’Andy Warhol qui en devient le mentor. Auteur de la célèbre pochette à la banane du premier album du groupe qui parait en mars 1967, c’est aussi lui le gourou de la Factory qui impose au quartet la mannequin et chanteuse Nico sur plusieurs titres. Andy Warhol Presents The Velvet Underground And Nico est un puis sans fond, un ovni où s’entrechoquent l’ADN d’animal rock’n’roll, folk et pop de Lou Reed, les velléités expérimentales de l’intello gallois John Cale et la voix de zombie de la belle Christa ‘Nico’ Päffgen. Au final, un superbe instantané du New York avant-gardiste de cette fin des années 60, qui ose la disto, le sexe et la violence dans une descente aux enfers, décadente et indomptable…




L’année suivant, White Light / White Heat resserre les boulons. Le potentiel expérimental du Velvet offre sa face la plus violente et dérangée avec des thèmes chamaniques et anthracites, comme le monologue free de The Gift ou l’orgie sonique de 17 minutes de Sister Ray ! Guitares saturées, motifs répétitifs, textes noirs, production inexistante, cette descente aux enfers marquera les plus grands terroristes du rock indé des années à venir, qu’ils se nomment Sonic Youth ou My Bloody Valentine… Mais l’ego de Lou Reed et ses pulsions dictatoriales poussent John Cale à quitter le navire pour le troisième album sobrement baptisé The Velvet Underground, sorte de point de départ de la carrière du Lou solitaire, avec ballades dépouillées et rocks binaires à l’os... Sur Loaded, quatrième et dernier album studio du Velvet Underground paru en 1970, Lou Reed propose les premières versions de ses hymnes Sweet Jane et Rock’n’Roll. Il quitte le navire à son tour et envisage pour de bon cette fois sa carrière solo qui prend son envol à Londres, en 1972, avec un premier opus éponyme, Lou Reed, pompeux (Steve Howe et Rick Wakeman du groupe Yes sont de la partie !) et raté. Mais la capitale anglaise va sourire au Lou qui croise la route de David Bowie…




Avec Transformer, son chef d’œuvre qui parait en novembre 1972, Lou Reed propose une version new-yorkaise du glam rock de Bowie. Celui-ci produit ce second disque solo, et prête au Lou son fidèle guitariste Mick Ronson. Grandiloquent et poète sur Perfect Day, nerveux et serré pour Vicious et noctambule sur Walk On The Wild Side qui livre un génial tango basse et sax, félin à souhait : voilà un album en forme de bande originale idéale d’une New York androgyne, décadente et plus urbaine que jamais.




Le génie de Lou Reed prend même une ampleur toute autre l’année suivante. Avec Berlin, album concept sublime et terrifiant, il décrit dans la cité teutonne décadente la descente aux enfers d’un couple de junkies, Caroline et Jim. Loin du très new-yorkais Transformer, il orchestre ici une symphonie morbide et quasi-baroque, qu’il contrebalance par des ballades épurées mais tout aussi glauques… Dans ce grand cabaret de la dépression ultime, Lou Reed est un maître de cérémonie parfait, cynique et faustien… En 1974, avec le bien nommé Rock’n’Roll Animal, un des live les plus vendus de tous les temps, il revient au classique rock’n’roll pétaradant et déballe ses plus puissantes chansons, portées à bout de bras par les guitares de Dick Wagner et Steve Hunter : Sweet Jane, Heroin, White Light/White Heat, Lady Day et Rock’n’Roll. En version glam rock, ses compositions trouvent ici une exubérance inédite.




La décennie 70 s’écoulera activement pour Lou Reed, plus excessif que jamais dans son quotidien (alcool et drogue), toujours aussi insaisissable dans sa vie affective (il vit un certain temps avec le transsexuel Rachel) et déroutant dans ses albums (au pauvre Sally Can’t Dance succède le culte et inaudible Metal Machine Music et ses 64 minutes de feedback et de distorsion !). Avec Coney Island Baby en 1975 et Street Hassle trois ans plus tard, il réussit encore à épater la galerie avec de nouveaux hymnes au bitume. Il attaque même les années 80 avec le très sous-estimé The Blue Mask avant de se perdre dans des enregistrements sans intérêt…




En 1989, New York marque son grand retour après des années plates. Avec un tel titre, le disque se devait d’être à la hauteur pour l’ambassadeur rock’n’roll de la ville. A 47 ans, Lou Reed signe ici son dernier chef d’œuvre en revenant d’une certaine manière à ses fondamentaux côté textes et musique, sans jamais s’auto-parodier. L’année suivant, il retrouve même John Cale pour un hommage à Andy Warhol en duo, le touchant Songs For Drella. Mieux : lors d’une exposition consacrée à l’artiste par la Fondation Cartier alors installée à Jouy-en-Josas, les deux hommes sont rejoints sur scène par Sterling Morrison et Moe Tucker le temps de reprendre Heroin : le Velvet Underground vient de renaitre de ses cendres durant quelques minutes ! Un happening qui donnera l’idée (mauvaise ?) au quartet de partir en tournée en 1993 et d’en garder une trace avec Live MCMXCIII.




Après un intéressant Magic & Loss en 1992, Lou Reed enquillera les disques médiocres, voire ridicules comme, en 2011, cette relecture de Lulu avec le groupe Metallica ! Des fausses routes et des fausses notes qui ne doivent pas masquer le génie passé d’un songwriter unique qui sut conjuguer l’essence même du rock’n’roll avec celle de son temps…




Lou Reed meurt le 27 octobre 2013 à Long Island à l'âge de 71 ans. Au printemps de la même année, il avait subi une transplantation du foie.


© MZ/Qobuz

Discographie

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