Si l'on reprend l'histoire de l'éclosion des convertisseurs analogique numérique, on s'aperçoit que ce sont les petits fabricants, pour certains apparus pour l'occasion, qui ont quasiment lancé et surtout dynamisé ce marché tiré par l'essor de la musique dématérialisée. Quant aux grands constructeurs Hi-Fi, ils se contentent pour la plupart d'une timide présence, préférant l'intégration directe d'un DAC à leurs amplificateurs. Et bien voilà maintenant que Korg, constructeur de matériel pour professionnels, lance les modèles DS-DAC-100 et DS-DAC-100m, deux DAC particulièrement affutés et convertissant, de plus, le DSD en natif !

Bien connue dans le milieu des musiciens professionnels (et aussi amateurs) pour ses synthétiseurs, pianos numériques, claviers et autres appareils destinés non pas à écouter de la musique, mais à en faire, la marque japonaise Korg lance une nouvelle offensive de poids sur marché de la Hi-Fi avec le produit qui représente probablement le plus l'avenir de l'écoute de la musique, à savoir le convertisseur numérique analogique autonome se banchant par USB à un ordinateur, plus simplement appelé DAC.

En effet, dès la fin de l'année 2012 Korg lançait le modèle DS-DAC-10, qui semblerait-t-il, est plus ou moins passé inaperçu dans le monde audiophile français (il n'était d'ailleurs pas disponible hors du Japon), un DAC USB qui avait cependant la particularité de traiter nativement les flux DSD depuis l'ordinateur jusqu'à la sortie de la puce de conversion.

Malgré cette spécificité technique rare, pour ne pas dire unique, le DS-DAC-10 restait très classique dans sa présentation, et ses successeurs, les modèles DS-DAC-100 (objet de ce banc d'essai) et DS-DAC-100m osent, pour le premier, une présentation intersidérale pour le moins "remarquable", et pour le second, qui est la version portable du premier, un look très original avec un boîtier au profil "en haricot aplati".

Sans doute Korg, constructeur habitué de manière quasi exclusive au monde professionnel, a-t-il (judicieusement) pensé que de nos jours les batailles auprès d'un public non professionnel se gagnent parfois simplement sur l'aspect et que celui-ci était donc un élément très important, et il a bien réussi son coup !

Mais Korg n'en est pas (heureusement) resté aux apparences, et, en dignes héritiers du DS-DAC-10, les DS-DAC-100 et DS-DAC-100m sont également compatibles avec le DSD natif (en 2,8 MHz et 5,6 MHz) et avec les signaux PCM jusqu'à 24 bits à 192 kHz.

On peut également dire que ces trois appareils bénéficient de l'expertise de Korg dans le domaine du DSD puisque ce constructeur propose depuis près d'une dizaine d'années déjà un enregistreur numérique DSD portable, le MR-2, un autre modèle, le MR-1000, destiné aux studios et pouvant enregistrer en DSD64 (2,8 MHz) et DSD128 (5,6 MHz), ayant également existé.

Avant de passer au banc d'essai du DS-DAC-100, il nous paraît intéressant, pour ne pas dire important, de faire une parenthèse sur le logiciel Audiogate 3 développé par Korg et qui permet la lecture et le transfert du DSD en mode natif depuis son ordinateur (PC comme Mac), puisque ce logiciel peut aussi procèder à un reformatage en DSD de tous les fichiers PCM, quel que soit leur échantillonnage et leur nombre de bits, comme le montre ce visuel extrait du white paper du logiciel Audiogate3.

Présentation

Look intersidérale, disions-nous pour le DS-DAC-100, tel un vaisseau spatial posé sur se trois pattes et tout droit sorti de la saga Star Wars de Georges Lucas.

Ne vous fiez surtout pas à cette vue de face qui fait presque paraître chétif le DS-DAC-100, l'appareil entre les mains prenant toute sa valeur avec son boîtier entièrement en alliage d'aluminium noir satiné et ses trois pointes en laiton pouvant prendre place dans des coupelles tournées dans le même métal et munies de pastilles de feutrine anti dérapantes.

Le gros bouton de volume (en aluminium massif) commande le niveau de la sortie casque située sur sa gauche, tandis que les diverses LED placées à sa droite (en fait de minuscules trous derrière lesquels se trouvent des guides de lumières) indiquent la fréquence d'échantillonnage et aussi l'état du DAC durant la phase d'initialisation après branchement à l'ordinateur.

Connectique

Pas de prise pour une alimentation externe à l'arrière du DS-DAC-100, celui-ci étant alimenté via la prise USB B. Les signaux audio sont disponibles (à niveau fixe) en mode asymétriques sur des prises Cinch dorées et en mode symétrique sur des connecteurs au standard professionnel XLR.

L'électronique

L'électronique du DS-DAC-100 est rassemblée sur un unique circuit imprimé de qualité professionnelle équipé de composants sur les deux faces, le passage des conducteurs d'une face à l'autre se faisant par des trous métallisés appelés "vias" (à noter que Korg, afin de maintenir un niveau de fabrication élevé, fait fabriquer ses DAC au Japon).

L'interface USB est assurée par un micro contrôleur à faible consommation Cypress CYC68013A travaillant en mode asynchrone. Vient ensuite un réseau de portes logiques programmables (field-programmable gate array ou FPGA) Xilinx Spartan XC3S100 dans lequel Korg a inscrit son programme de traitement des signaux en provenance du CYC68013A.

On remarquera les deux quartz à 22,579 MHz et 24,576 MHz permettant la synchronisation avec les signaux à 44,1 kHz et multiples et ceux à 48 kHz et multiples, car le DS-DAC-100 peut fonctionner en PCM en mode ASIO avec Audiogate 3 et aussi avec d'autres lecteurs logiciels.

Juste à côté du circuit Xilinx, on trouve le micro contrôleur de gestion de la carte, un modèle NEC ?PD78F0765 travaillant sur huit bits, tandis qu'un circuit TPS62111 (convertisseur continu-continu à haut rendement), situé à côté des quartz, fournit la tension de 3,3V nécessaire au fonctionnement de la puce de conversion numérique analogique CS4398 du fabricant Cirrus Logic.

Ce circuit CS4398 est l'un des rares convertisseurs numérique analogique qui soient compatibles avec les fichiers DSD en mode natif, c'est-à-dire sans passer par une phase de conversion du DSD en PCM.

Des débats sur ce sujet ont eu lieu sur des forums et nous même, qui sommes fortement intéressé par le sujet, avons épluché le datasheet du CS4398 où il est clairement indiqué par Cirrus Logic que dans le mode Direct DSD ces signaux utilisent directement le filtre à capacité commutée (lt also offers an optional path for direct DSD conversion by directly using the multi-element switched capacitor array).

Pour les amateurs pointus, Cirrus Logic précise également sur ce datasheet les registres à programmer pour passer dans ce mode (bit DSD_SRC à 1 dans le registre 02h pour sélectionner les entrées DSD de la puce, bit DIR_DSD à 1 dans le registre 07h pour envoyer directement le flux DSD sur le filtre à capacité commutée), contrairement, par exemple, au PCM1795 de Burr-Brown acceptant aussi les signaux DSD et utilisé dans certains DAC compatibles DSD, où nous n'avons pu trouver une quelconque mention de programmation de registres permettant l'envoi direct du flux DSD sur le filtre de sortie.

Pour info, et toujours pour les fans de technique, Cirrus Logic mentionne également :

The DIR_DSD bit (Reg 07h) selects between two proprietary methods for DSD-to-analog conversion. The first method uses a decimation-free DSD processing technique that allows for features such as matched PCM level output, DSD volume control, and 50 kHz on-chip filter. The second method sends the DSD data directly to the on-chip switched-capacitor filter for conversion.

Soit, traduit en français :

Le bit DIR_DSD (Reg 07h) permet la sélection de deux méthodes de conversion DSD analogique propriétaires. La première méthode utilise un processus de technique de décimation du DSD qui permet des fonctionnalités comme l'alignement avec les niveaux en PCM, le contrôle du volume en DSD, et le filtrage à 50 kHz sur la puce. La seconde méthode envoie directement les données DSD sur le filtre à capacité commutée intégré à la puce.

Les signaux convertis par la puce CS4398 sont ensuite débarrassés de tout bruit à haute fréquence par des filtres actifs construits autour d'amplificateurs opérationnels LME49721 à hautes performances spécialement conçus pour fonctionner avec une tension d'alimentation unique comprise entre 2,2 et 5,5V. Ceux-ci sont situés sur la deuxième face de la carte (repérés IC18 et IC19).

Ils entament alors la phase finale de leur parcours vers les prises de sortie au travers de drivers de ligne Texas Instruments DRV603 disposant d'une pompe de charge générant une tension négative afin de référencer les signaux au 0V (les signaux analogiques en entrée sont référencés à 2,5V) et d'éviter ainsi l'utilisation de condensateurs de liaison vers l'amplificateur auquel sera relié le DS-DAC-100.

Ces drivers de ligne sont repérés IC17, IC20 et IC21 sur la carte. Ils sont au nombre de trois car l'un d'eux est affecté aux sorties stéréo asymétriques, tandis que chacun des deux autres travaille sur un seul canal en mode symétrique pour les sorties du même nom. On notera que le niveau de sortie sur les prises Cinch possède la même amplitude que la différence des signaux symétriques (signal positif moins signal négatif identique = deux fois signal positif, principe de fonctionnement d'une liaison symétrique aussi appelée liaison différentielle qui a pour finalité d'éliminer d'éventuels signaux parasites venant polluer les signaux audio).

L'amplificateur pour casque est un modèle Texas Instruments TPA6130A2 pouvant délivrer 300 mW dans 16 ? et qui possède des entrées différentielles et un réglage de volume par bus I2C (utilisé sur le DS-DAC-100m). Ce réglage électronique ne sert pas sur le DS-DAC-100, puisqu'il est confié classiquement à un potentiomètre, de marque Alps en l?occurrence, fabricant réputé dans ce domaine.

Utilisation, écoute

Pour pouvoir lire les fichiers en DSD natif sur son PC ou son Mac, il faudra installer le logiciel Adiogate3 de Korg, ainsi que les DS-DAC Driver (pour PC et aussi Mac). Audiogate 3 (actuellement en V3.0.1) , et les drivers sont téléchargeables depuis cette page du site Korg.

Ce logiciel bénéficie d'une présentation par défaut agréable (deux premiers visus ci-dessous) et propose différents habillages, qu'il appartiendra à chacun d'apprécier selon ses goûts.

Nous disions dans l'introduction que le DS-DAC-100 peut reformater les fichiers PCM en DSD64 ou DSD128 et il faudra pour cela imposer la lecture en DSD via le Korg Control Panel. Ces fonctionnalités avancées s'expliquent par le fait que le logiciel Audiogate 3 a été développé par Korg à partir du logiciel Audiogate V2.3 servant pour faire du montage audio avec les enregistreurs numériques DSD MR-2 et MR-1000.

On peut également, à tout moment en cours de lecture, changer à la volée le format de DSD vers PCM, ou inversement, et ce dans la fréquence d'échantillonnage de son choix, le DS-DAC-100 marquant alors un bref temps d'arrêt et se resynchronisant sur la fréquence choisie.

Il faut pour cela cliquer dans la flèche située dans le coin supérieur gauche de la fenêtre et sélectionner "edit-preferences", puis cliquer sur la fréquence de son choix.

Nous vous donnons ces informations pour avoir joué avec ce logiciel pas comme les autres, mais visiblement le manuel d'utilisation du DS-DAC-100 reste assez évasif sur ces possibilités très intéressantes et nous n'avons pas trouvé de guide d'utilisation de ce logiciel.

Monsieur Korg, faites quelque chose ! Et nous en avons glissé deux mots à l'importateur, Algam.

Venons-en maintenant aux résultats sonores, et, comme on pouvait s'y attendre, ceux-ci sont excellents.

A l'écoute de notre album référence, la Fantasia on British Sea Songs de Henry Wood, c'est à de grands moments de plaisir musical que nous a convié le Korg DS-DAC-100.

Bien que le logiciel Audiogate 3 soit capable de conversions de formats (PCM vers DSD entre autres), c'est dans son format natif 16 bits à 44,1 kHz que nous avons écouté l??uvre de Henry Wood.

Dès les premières notes, on est pris par la restitution sonore du DS-DAC-100 et cela se maintient durant toute l??uvre et va même crescendo lors de l'apothéose finale.

Tout est là et bien là, fidélité des timbres, aération et finesse du message sonore, léger tintement du triangle parfaitement audible dans l'introduction de The Saucy Arethusa ou encore très beau chant des cordes jouant piano dans Tom Bowling, suivi dynamique sans faille jusqu'à la conclusion explosive de Jack's the Lad, superbe rendu des cuivres soutenus par des cymbales "cinglant" à souhait dans le Rule Britannia concluant glorieusement cette ?uvre.

Véritable envolée vers des sommets encore plus élevés de la restitution musicale à l'écoute de l'Allegro de la version 24 bits à 192 kz de la Suite Américaine de Dvorak par l'Orchestre du Festival de Budapest dirigé par Ivan Fischer où l'on se régale de toute la saveur de cette musique aussi dynamique que colorée qui est restituée avec maestria par le DS-DAC-100.

Quant au titre Roar de l'album Prism de Katy Perry, il prend bien aux tripes dans une restitution punchy où la présence de la chanteuse est très bonne et l'accompagnement restitué avec bonheur dans ses moindres détails.

Et comme il faut toujours garder le meilleur pour la fin, la restitution de fichiers DSD en mode natif est tout simplement époustouflante, et, ce bien que les fichiers de test que nous a fournis Korg nous aient été inconnus. C'est dire si une qualité de reproduction top niveau avec des fichiers de qualité peut faire son effet et agir en sorte que l'on s'y croit presque, se laissant simplement griser par les ondes sonores, pardon, les ondes musicales ! Bref, on en redemande.

Korg nous ayant prêté à l'occasion de ce test un casque Phonon (prononcez Fonone) SMB-02 mis au point par un audiophile japonais et qui a tapé dans les oreilles de Korg (casque qui sera très probablement proposé en bundle avec le DS-DAC-100 et dont nous publierons prochainement un banc d'essai), nous avons procédé à diverses écoutes, en particulier de fichiers DSD, ceux fournis par Korg et aussi L'Allegro du Concerto pour violon en ré de Mozart (fichier de test du site 2L.no/hires) dont la précision et la finesse de la restitution en DSD64 (2,8 Mhz) comme en DSD128 (5,6 MHz) laissent les oreilles pantoises.

Pour conclure, vous ne serez pas surpris que nous disions que nous sommes tombé sous le charme du Korg DS-DAC-100, un convertisseur dont la technique ne cherche pas à n'importe quel prix à annoncer des chiffres dont l'oreille n'a bien souvent que faire, mais offre une haute qualité sonore et s'appuie sur un lecteur logiciel hors du commun qui permet aux audiophiles les plus fous d'écouter des fichiers DSD en mode 100 % natif, même si leur diffusion reste encore assez confidentielle. Qobuzissime donc pour le DS-DAC-100 !

Spécifications

Manuel d'utilisation (Owner's Manual) (English, Français, Deutsch, Spanish)

DS-DAC-100 site importateur

DS-DAC-100 site Korg

Site Algam (importateur)

Contact

Contact Algam pour revendeurs

Korg vient d'annoncer la disponibilité de la version 3.0.2 du logiciel Audio Gate

Cette version 3.0.2 d'Audio Gate est une mise à jour majeure puisqu'il s'agit de la version complète qui intègre effectivement le module d'édition permettant entre autre la conversion de fichiers par groupe, la normalisation, etc...

Capacités de lecture

Si vous êtes constructeur, importateur, distributeur ou acteur dans le domaine de la reproduction sonore et que vous souhaitez nous contacter, merci de le faire à l'adresse suivante : newstech@qobuz.com