Smetana: Má Vlast

Chronique

Le très célèbre cycle Ma Vlast (Ma patrie), en vérité, n'est en rien un cycle : chacun des six poèmes symphoniques qui le composent furent écrits individuellement, entre 1847 et 1879, créés séparément, et seulement présentés comme une œuvre pseudo-cohérente en 1882. Aucune cohérence stylistique, mélodique, formelle, aucun rappel de l’un à l’autre pour une éventuelle conception « cyclique » hormis entre les deux derniers qui « s’enchaînent » plus ou moins, les tonalités elles-mêmes sont on ne peut plus éloignées de l’un à l’autre : mi bémol majeur pour Vyšehrad (du nom de la colline surplombant Prague, et dans le cimetière de laquelle est inhumé Smetana) contre mi mineur pour Vltava - la célèbre et presque prononçable Moldau - : la mineur pour la méchante et cruelle Šárka qui massacre tous les hommes qui lui tombent sous la main, contre solmineur pour l’imprononçable Z českých luhů a hájů (Par les prés et les bois de Bohême). Seuls le ré mineur du Tábor (ainsi s’appelle la ville où ont pris places les guerres hussites) et le même < i>rémineur du dernier poème Blaník s’accordent, tandis que l’avant-dernier et le dernier mouvement peuvent éventuellement se suivre, musicalement parlant. En d’autres termes, voilà vraiment un ouvrage composite où tout l’art du chef, Theodore Kuchar dans le présent enregistrement, consiste à donner une certaine cohérence au propos de Smetana. Et pour les écologistes, l'on précisera que les rapides de Saint-Jean que décrit le compositeur dans le passage le plus houleux de La Moldau n'existent plus depuis 1945, lorsque l'on décida de construire un barrage à la place. © SM/Qobuz