Elle était une fois

Chronique

La rumeur qui a suivi la sortie de son premier essai, l'EP Cornerstone, en 2013, n'a fait que s'amplifier après les prestations de Benjamin Clementine à travers l'Hexagone, livrant un à un des concerts restés gravés dans les mémoires. L'irruption de ce talent hors-norme ne doit pas seulement au conte de fée qui l'a vu passer des couloirs du métro parisien aux studios et scènes de festivals mais surtout à un timbre de voix poignant, accordé à des compositions intenses et prégnantes.

Comme attendu, c'est cette voix de ténor lyrique poussé qui embrase ce premier recueil, délivré après une succession de titres et des mois à guetter son arrivée, précédée par des morceaux à haute teneur émotionnelle, qu'il est bon de rappeler, comme l'aérien « London », l'épique « Condolence » (dans une version plus longue), le somptueux récit autobiographique « Nemesis », et le précité « Cornerstone ».

Néanmoins, At Least for Now reste une demi-surprise de taille en ce qu'il apporte sept chansons inédites confirmant la puissante originalité du chanteur londonien. Parmi elles figurent « Adios », une composition théatrale où voix et piano dansent autour des cordes, et « Winston Churchill's Boy », portée par un chant acrobatique. La mélodie classique de « Then I Heard a Bachelor Cry », qui suit, emporte l'adhésion par sa tonalité de lied mélancolique et son interprétation dramatique.

Plus loin se glisse un étonnant blues-minute, « St-Clementine-on-Tea-and-Croissants », une work song en forme de retour aux sources de son inspiration teintée de soul et de gospel. Cet aller-retour entre le classicisme de son apprentissage au piano et les musiques séculaires qui l'ont nourri dévoile toute la complexité cachée derrière le phénomène Benjamin Clementine. Le jeune homme (vingt-six ans) doté d'une empreinte vocale et d'une présence fortes, original dans son approche harmonique, tutoie la perfection tout au long d'un album qualifiable de classique instantané.

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