Prokofiev: The Piano Sonatas, Vol. 2

Chronique

Disciple de Vladimir Feltsman, le pianiste russe Ilya Yakushev a remporté en 2005 le Premier Prix au célèbre Concours de Cincinnati, ce qui lui a illico ouvert en grand les portes de la scène concertante nord-américaine – ainsi bien sûr que celle de son pays natal. Il nous propose ici un choix de trois Sonates de Prokofiev pour le deuxième volume de son intégrale : la Première Op. 1 de 1907, écrite en un seul mouvement, nous montre un Prokofiev de dix-sept ans déjà en possession de moyens considérables, même si l’héritage de Rimski-Korsakov et de Rachmaninov se fait encore sentir. La Deuxième Sonate, de 1912, est déjà pleinement prokofievienne dans son « motorisme » teinté de lyrisme et de tendre âpreté, si l’on veut bien accepter l’oxymore. La Neuvième, écrite en 1947 et dédiée à Sviatoslav Richter, s’éloigne totalement de ce que l’on croit savoir de Prokofiev. Tendresse, douceur, concision, économie de moyens, même les moments plus remuants s’approcheraient d’une sorte de langage baroque. L’Andante déroule l’une des plus belles lignes mélodiques imaginées par Prokofiev – dont, précisons-le, c’était là l’ultime œuvre pour piano. Yakushev sait magistralement étager les plans sonores et définir des couleurs simultanées et pourtant très différentes, d’une main à l’autre, voire d’un doigt à l’autre d’une seule et même main. On aurait presque l’impression que deux ou trois pianistes se partagent l’exécution, chacun avec un toucher spécifique. Magistral. © SM/Qobuz