The Secret

Chronique

Après un précédent album – live – merveilleux appariement entre l’Afrique de l’Ouest et les ondoiements hendrixiens, mais ratatiné par le contexte de pop-singers à paillettes, pensant revivifier la brillance des Pet Shop Boys sous le prétexte fallacieux qu’ils savent tout des connectiques de synthétiseurs vintage, Vieux Farka Touré (jeune héritier de l’Ali Farka de semblable lignée) investit de nouveau un studio (en l’occurrence The Bunker, à Brooklyn), et c’est du lourd.

Du lourd, voire de l’improbable, avec la participation post-mortem et à grandes lampées de tables tournantes dans la chanson-titre de Papa, sans nul doute pour quelques bonnes nouvelles des étoiles : la mélopée, hypnotique comme il se doit, et illuminée de la flûte amoureuse de Cheick Diallo, emprunte en effet aux dernières sessions du maître, avant cancer en phase terminale, quelques vers verts, tout à la fois classiques et définitifs.

La piste aux étoiles égrène par la suite une myriade de queues de comètes scintillantes, de Dave Matthews (notre ami virginien et folk-rocker) à Derek Trucks, en qui nos grands anciens reconnaîtront la doublure lumière des frères sudistes et ennemis au sein de l’Allman Brothers Band. La liste des invités est complétée grâce au natif de Woostock et guitariste Eric Krasno, qui assure également ici la fonction de producteur, au spécialiste de la six-cordes suave John Scofield, et au Néo-Orléanais Ivan Neville, naturellement rejeton d’Aaron.

On pourrait craindre que le Malien soit étouffé par pareil contexte : la crainte est levée dès les premières mesures de « Sokosondou », ouverture électrique et onirique. Et implose par la suite, dans ces douze chansons qui se partagent équitablement entre groove, Afrique palpitante, jazz, rock ensoleillé et harmonies chaleureuses. Vieux Farka Touré décline le tout d’une voix sensuelle et matoise, sûr de son fait, et de la fée électricité qu’il domine amplement, offrant à sa musique des implications aussi contemporaines qu’enracinées.

Le Secret (qu’on aimerait moins bien gardé ces derniers temps) n’est pas le meilleur album de musique africaine du moment. Il s’agit de l’un des albums majeurs de 2011, pas moins. Après, il reste les synthétiseurs, aussi. C’est à vous de voir.



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