Ilo Veyou

Chronique

En 45 minutes et quinze pièces, Camille maman (sa grossesse et sa première maternité constituent – peut-être - le fil de cette nouvelle production), actrice (elle s’installera au début de 2012 sur la scène des Bouffes du Nord pour y incarner La Dame de la Mer, héroïne d’Ibsen en chemin vers un véritable amour), et rayonnante offre une suite légère (i.e. aérienne) à un Music Hole scandé de percussions corporelles.

Dans un album délibérément acoustique, c’est-à-dire riche de ces instruments que l’on tripote, martèle, ou dans lesquels on souffle, à l’instar du vent caressant les cordes vocales, et conçu à l’ancienne – tous les musiciens (très majoritairement un quatuor à cordes, mais également ici ou là la guitare acoustique de l’arrangeur Clément Ducol) ensembles à toucher – la chanteuse ne s’est autorisée que quelques rares séductions technologiques, unique moyen par exemple d’incarner à elle seule toute une chorale d’enfants.

Souvent, Camille chante en anglais, et si l’on perd le sens, on n’égare pas le rêve. Car c’est bien de pérégrination onirique dont il s’agit ici, de ces balades en tapis volant qui font osciller l’auditeur de madrigaux en comptines, de folk music orthodoxe en babil d’enfants, de jeux de mots pas laids a capella en chanson néo-réaliste. La boîte à musique de la jeune femme a manifestement pris un large définitif vis-à-vis d’une expression traditionnelle, mais c’est à ce prix que ce florilège d’atmosphères changeantes n’entre jamais dans la catégorie infamante de la musique d’ameublement. En lieu et place, Camille saisit à bras-le-corps toutes ses humeurs, ses humours et malheurs, pour, souvent en état de grâce, les magnifier par un chant de pure virtuosité.

L’anecdote mentionnera le très acide « La France », qui, dans son portrait d’un Hexagone faisandé et impuissant, fera jaser à proximité de certaines échéances électorales. Mais la saveur de Ilo Veyou réside bien naturellement ailleurs, dans une magie de chaque mesure, offerte par une chanteuse confortable dans la pop et le R&B, pour peu qu’elle y imprime une empreinte personnelle jusqu’à l’intime.

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