Classique, electro, world, chanson : le Festival d’Île-de-France célèbre tous les styles jusqu’au 9 octobre avec notamment Carl Craig, Tomatito, Front 242, Pascal Comelade, Jean-Christophe Frisch et bien d'autres.

Encore quinze jours ! L’édition 2011 du Festival d’Île de France se tient jusqu’au 9 octobre prochain. Chaque année cette grande manifestation éclectique à souhait propose une sélection d’une trentaine de concerts dans des lieux du patrimoine francilien. Pour chaque spectacle, le festival fait coïncider découverte musicale et découverte du patrimoine régional. Spectacles et lieux sont choisis en étroite relation, de sorte que contenu et contenant s’apportent mutuellement sens et émotion.

QUELQUES EVENEMENTS DU FESTIVAL 2011 :

- Front 242 – Arnaud Rebotini (30 septembre, 20h30, Gaîté Lyrique)

Pour cette soirée dans la nouvelle Gaîté Lyrique, où les époques s’entrechoquent et se conjuguent, l’espace se fait cyber et le réel devient virtuel. Les romanciers des films noirs de la science-fiction que sont Georges Orwell, Philip K. Dick ou Aldous Huxley ont inspiré de très nombreux antihéros des musiques industrielles et des musiques électroniques. Ces œuvres ont popularisé l’idée de la fusion de l’humain avec la machine. Leurs mondes sont peuplés d’êtres hybrides, androïdes, faits de chair et de métal. La technologie et l’intelligence artificielle y règnent en maîtres. La posture du cyber-artiste, mélange de rockeur et de fanatique de science et d’innovations technologiques, se retrouve dans la provocante Electronic Body Music du groupe culte belge Front 242. Tel un oxymore, la froideur et la transe de leur musique se télescopent au cœur de la machine, dans une musique souvent qualifiée de radicale et minimaliste. En ouverture de la soirée, le très influent producteur français Arnaud Rebotini présentera son dernier opus, 2Tone Vision Live, étonnante plongée au cœur de ses claviers surgis du passé. Et si dans le monde cyberpunk la technologie avance parfois plus vite que la pensée, force est de constater que dans la réalité les artistes gardent bien le contrôle de leurs machines.

- Erik Marchand : 30 septembre, 20h45, Théâtre du Garde-Chasse, Les Lilas

C’est un rêve un peu fou dans lequel Erik Marchand a décidé de nous entraîner, celui d’une musique qui aurait traversé le temps, indemne des influences harmoniques modernes, et dont les traces sont encore présentes dans quelques répertoires traditionnels qui ont défié les années.

- Orchestre Poly-Rythmo (2 octobre, 16h, Pavillon Baltard, Nogent-sur-Marne)

De l’ancien royaume du Dahomey, terre de sa naissance, le vaudou hérite de mélodies et de rythmes séculaires. Au gré des cérémonies s’échappent les sons des tambours, gongs et autres instruments rituels qui inspireront bientôt les cuivres et les guitares d’une formation de légende : le Poly-Rythmo. Fondé à la fin des années 60, il accompagne les plus grandes stars du continent noir, de Fela à Myriam Makeba. Profondément ancré dans cette terre de mythes et de magie, l’orchestre s’imprègne peu à peu des influences portées par les voix de l’Amérique, de James Brown à Aretha Franklin, et de la variété française de l’époque. Cette combinaison unique, mâtinée de jazz, de soul, de funk et d’afrobeat, en fait très rapidement l’une des formations les plus en vue au lendemain des indépendances. Quarante-deux ans après sa création, c’est une pépite qui se laisse redécouvrir avec le même émerveillement et nous entraîne dans le groove hypnotique et enivrant qui résonna dans les cabarets d’Afrique occidentale et bien au-delà. Nous vous invitons en ce dimanche après-midi à partager un moment rare et captivant, au milieu des étals où se dégustent les spécialités béninoises et la Tchapalo, la bière traditionnelle. La grande halle de l’ancien pavillon n°8, qui hébergeait jadis le marché des œufs et de la volaille au cœur de Paris, prendra alors des airs de Zénith, le mythique dancing de Cotonou, où il fera bon se laisser guider par les esprits de la danse…

- Ensemble XVIII-21 - Le Baroque Nomade & Pandit Shyam Sundar Goswami (2 octobre, 17h, Théâtre Municipal de Fontainebleau)

En 1754, Joseph-François Dupleix embarque sous la contrainte dans un navire qui le ramène vers la France. Il laisse derrière lui, outre son poste de Gouverneur général des Etablissements Français de l’Inde, la ville de Chandernagor qui fut au cœur du Bengale le dernier espoir d’un empire commercial français. Musicien éclairé, les partitions retrouvées de sa bibliothèque nous renseignent aujourd’hui sur cette musique française, qui traversa les océans et rencontra les répertoires savants qui se développaient alors au sein des cours hindoues. Jean-Christophe Frisch nous guide au cœur de cette Inde du XVIIIe siècle, fantasmée et méconnue, qui souvent prit pour les occidentaux les traits de Kali, déesse à la beauté vénéneuse et reine d’une nuit où le danger fascine. La musique s’y invente et s’y révèle dans une rencontre inédite entre les œuvres de Marin Marais et de Lully et la voix du chanteur Pandit Shyam Sundar Goswami. D’une grande liberté d’interprétation les ragas de la nuit profonde expriment les humeurs et les émotions qui surgissent de ces heures nocturnes. Le dialogue se noue, dans l’inspiration de ces musiques savantes, et entrouvre les portes d’un imaginaire où les sonorités baroques se mêlent aux anciens chants sanscrits. Dans cette écoute de l’autre et du lointain, où peu à peu la réalité et le temps se perdent, ce moment précieux est une invitation au rêve, le partage de notre songe d’une nuit indienne.

- 69 Live (Carl Craig) + Urban Tribe (5 octobre, 20h30, Gaîté Lyrique)

La ville de Détroit a marqué de son empreinte l’histoire de la musique populaire américaine. La fin du XIXe siècle marque les premières installations de l’industrie automobile, au point que la ville fut rapidement surnommée The Motor City ou Motown. Cette Paris du midwest resplendissait de bâtiments de style Beaux Arts ou Arts Déco. Un siècle plus tard, la chute de l’industrie automobile dans les années 80 précipite la ville dans le déclin économique. Cependant, elle va donner naissance dans le même temps à la dernière révolution musicale du siècle dernier : la techno. Musique sans concession, elle s’appuie sur les nouvelles technologies pour lancer un cri d’espoir face à la désolation de ce monde industriel. La première génération de ces hérauts d’un nouveau genre s’appelle Juan Atkins, Derrick May ou Kevin Saunderson. Ils refusent alors toute récupération médiatique et sont porteurs d’un univers artistique inspiré de futurisme, composé de métaphores mythologiques et nourri de science-fiction. Carl Craig, né en 1969, est l’icône de la deuxième génération de ces pionniers. Il est devenu au fil des années l’ambassadeur de son Detroit natal. Il incarne aujourd’hui plus que jamais, avec les vingt ans de son label Planet E, la vision d’une musique fascinée par les futuristes italiens. Il présente ce soir pour la première fois en France son projet live “69”, référence à l’un de ses tout premiers pseudonymes.

- Chœur National d’Hommes d’Estonie (7 octobre, 20h30, Eglise Saint-Eustache)

Sur les rives de la Baltique, en Estonie, vit un peuple chantant. Elément identitaire fort, la voix y revêt une réelle importance et dès 1869 fut créé le premier festival pan-estonien de chant. Entre 1987 et 1990, il s’imposa comme l’un des principaux outils de la révolution qui conduisit le pays vers une indépendance retrouvée. Le Chœur National d’Hommes d’Estonie est l’un des rares ensembles professionnels de ce type. Sous les voûtes grandioses de l’Eglise Saint-Eustache, où l’ornementation Renaissance répond à la structure gothique, les voix riches et puissantes des cinquante choristes nous mènent vers des rivages emplis d’une intense et ardente spiritualité et transcendent les croyances et la nature de la foi. Les œuvres d’Arvo Pärt nous relient à l’intériorité profonde de l’être, à cette expérience poignante du silence et de l’épure, semblable à une quête paisible et réconfortante de l’absolu. Elles répondent dans une communion partagée à celles de Veljo Tormis, l’un des compositeurs majeurs de la musique chorale contemporaine. Marquées par les anciens chants traditionnels et la grande épopée finnoise du Kalevala, ses compositions nous plongent dans les racines pré-chrétiennes du chant estonien. Accompagnées du grand tambour chamanique, les voix nous guident vers une région à part, là où les forces célestes et telluriques se rejoignent et où le ciel se mêle au bleu des flots.

- Pascal Comelade + Male Instrumenty (8 octobre, 20h, la Cigale)

L’extravagance, l’humour, la dérision et l’esprit d’enfance sont les singulières caractéristiques qui unissent les Polonais de Male Instrumenty et le Catalan Pascal Comelade. Leurs univers s’apparentent au puzzle, à l’assemblage musical et nous offrent une vision décalée de notre réalité. Détourner, inventer, tels sont les moteurs de leur exigence artistique, parfois bien au-delà du rêve et du fantasme. On entend chez Comelade, la douceur des berceuses de notre enfance, le souvenir d’une chanson entendue il y a bien longtemps. C’est un petit air qui se fredonne sans effort, quelques notes qui nous emmènent avec légèreté du côté du piano d’Erik Satie, des mélodies de Kurt Weill ou de Nino Rota… Un petit grain de folie supplémentaire nous attend avec Male Instrumenty et les instruments les plus fous : orgues sixties, guitare flamenca, flûtiaux, accordéon chinois, bombardes, pépiements d’oiseaux en tout genre, mélodicas et violons aux faussetés savamment entretenues. Cette large gamme d’instruments faits de jouets pour enfants ou autres inventions illustre pour un soir la poésie des images peintes des films d’animation du réalisateur avant-gardiste Julian Antonisz. Chacun d’entre nous se reconnaît dans cette musique à la trajectoire non rectiligne. Avec malice, cette soirée nous invite à venir prendre les chemins de traverse, à entrer dans ce drôle de cabaret, pour un bal ludique et fantasmatique.

- Tomatito invite Rancapino (9 octobre, 16h30, Bataclan)

Lorsque l’inspiration se fait authentique au service d’une émotion projetée à son paroxysme surgit un moment de grâce, un moment hors du temps, comme suspendu entre deux mondes. Une fusion totale entre l’audience et le cantaor s’installe alors et la magie du duende opère et hypnotise. Charme mystérieux et indicible, il inspira et fascina le poète García Lorca qui le distingua des muses et des anges. Viscéral, le duende émane des profondeurs insondables de l’être, il s’empare des corps avec fulgurance et conduit à une transe extatique et incarnée. Tomatito est assurément entré dans la légende et compte parmi les guitaristes les plus remarquables du monde flamenco. Celui qui dix-huit années durant partagea le prodigieux destin du chanteur Camarón de la Isla continue avec bonheur de réinvestir et de réinventer un flamenco pourtant ancré dans la tradition. Musicien virtuose et incandescent, il convie ici le chanteur Rancapino dont la voix rauque sublime le cante jondo, le chant profond, « véritablement profond, plus encore que tous les puits et toutes les mers qui entourent le monde, beaucoup plus profond que le cœur actuel qui le crée et que la voix qui le chante, parce qu’il est presque infini » (García Lorca). Pour ce concert de clôture, Tomatito en appellera au souffle de l’esprit du duende, tapi au cœur de nos émotions, et nous invite à nous laisser porter vers un ailleurs inspiré, celui de la beauté et de l’ivresse, de la virtuosité et de la grâce.

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