La Cité de la Musique met Beethoven à l’honneur dans une série de cinq concerts consacrés aux neuf symphonies du compositeur qui seront dirigées par Emmanuel Krivine à la tête de la Chambre Philharmonique.

Du 14 au 16 avril, la Cité de la Musique à Paris s’intéresse à Beethoven avec une série de cinq concerts consacrés à ses neuf symphonies. Le chef d’orchestre Emmanuel Krivine dirigera la Chambre Philharmonique, ensemble qui joue sur instruments d’époque, fondé en 2004 par une association de musiciens, dont Krivine, qui le dirige depuis sa création.

Les Symphonies n°4 et 7 seront interprétées et le 14 avril, les n°2 et n°6, « Pastorale » le 15 avril ; le samedi 16 avril deux concerts seront proposés, le premier à 16h30 abordera les Symphonies n°8 et n°5, le second à 20h, les Symphonies n°1 et 3 « Héroïque » . Enfin, le 17 avril à 16h30, la Neuvième, « Hymne à la joie » sera jouée, avec comme chanteurs solistes Christiane Karg (soprano), Caroline Masur (alto), Dominik Wortig (ténor), Konstantin Wolff (basse) et le chœur Les Eléments.

La Symphonie n°1 en do majeur a été composée entre 1799 et 1800, et dédiée au baron Van Swieten, mélomane ami de Mozart et de Haydn, ainsi que le premier protecteur de Beethoven à Vienne. Le compositeur a 30 ans lorsqu’il l’écrit : il est en pleine maturité et a déjà produit plusieurs œuvres majeures (concertos, sonates, trios et quatuors). Malgré une structure très classique et un bon accueil du public, l’œuvre fut critiquée pour son aspect novateur, avec l’importance des cuivres, les nombreuses modulations et une ouverture qui ne débute pas par la tonalité principale. L’influence de l’esthétique classique du XVIIIe est indéniable, dans ce premier opus symphonique.

La Symphonie n°2 en ré majeur opus 36 a été composé en 1801 et créé en 1803 à Vienne, sous la direction du compositeur lui-même. Elle est dédiée au prince Carl von Lichnowsky, mécène du compositeur. Il la compose alors que sa surdité se déclare, ce qui aboutit de sa part à une profonde remise en question de son art. Néanmoins rien de ses interrogations tourmentées ne transparaît. L’œuvre reçue un accueil mitigé : les critiques lui reprochent entre autres le final « confus » voire « barbare ».

L’«Héroïque » ou la Symphonie n°3 en mi bémol majeur a été écrite entre 1803 et 1804. Les observateurs la considérait à l’époque comme annonciatrice du romantisme musical. Elle est l’une des œuvres les plus populaires de Beethoven. Elle a été dédiée à Napoléon Bonaparte, que le compositeur admirait en tant qu’incarnation des idéaux de la Révolution française. Cependant, quand le dirigeant français fut proclamé empereur en mai 1804, le compositeur effaça le nom Bonaparte de la page titre (qui était au départ Sinfonia grande, intitolata Bonaparte). En fin de compte, elle sera dédiée à son grand mécène, le Prince de Lobkowicz.

L'œuvre est considérée comme un élément déterminant de l'histoire de la musique classique pour sa durée notamment (elle est deux fois plus longue que toutes les symphonies de Haydn ou de Mozart). Dans cette œuvre, Beethoven couvre aussi beaucoup plus de terrain émotionnel que ses précurseurs : en effet, la Symphonie « Eroica » est souvent considérée comme prémices de la période romantique en musique.

La Symphonie n°4 en si bémol majeur fut écrite en 1806. Tranquille et paisible, elle contraste avec la Symphonie n°3 ou la Symphonie n°5.

La Symphonie n°5 en ut mineur, « Symphonie du Destin » écrite entre 1805 et 1807, est dédiée au Prince de Lobkowitz et au comte Razumovsky. Elle a acquis une grande renommée dès les premiers temps qui ont suivi sa première exécution, le 22 décembre 1808 à Vienne.

Cette Cinquième Symphonie est le fruit d’une longue maturation, les premières ébauches datent de 1804. Écrite pour orchestre symphonique, l'œuvre voit son instrumentation étoffée par rapport aux précédentes symphonies : un piccolo pour l'aigu, un contrebasson pour le grave et trois voix de trombone (alto, ténor et basse) pour les cuivres sont ajoutés pour la première fois, ils n'interviennent que dans le finale.

La Symphonie n°6 en fa majeur, « pastorale » fut composée entre 1805 et 1808 simultanément à la Cinquième. Tranchant avec les autres œuvres du compositeur, c'est sa seule symphonie à programme (les autres relevant de la musique pure). Elle est écrite en référence explicite à des phénomènes du monde réel et évoque en l'occurrence le thème de l'expérience de la nature, d'où son nom de « pastorale ». La forme de cette symphonie est caractéristique de la musique à programme : ce n'est plus la structure fixe de la symphonie classique en quatre mouvements prédéterminés, mais une forme en cinq mouvements, adaptée au thème.

La Symphonie n°7 en la majeur a été composée parallèlement à la 8e Symphonie en 1811. Elle marque un retour vers une forme strictement classique, après les écarts des précédentes, avec une composition purement musicale sans message d’éthique. Elle est structurée en quatre mouvements, formant une succession de danses, de colorations et de rythmes différents, une « apothéose de la danse » selon Richard Wagner.

La Symphonie n°8 en fa majeur est créée à Vienne le 27 février 1814. Cette œuvre est plus courte et plus légère que les autres œuvres symphoniques de Beethoven. Elle ne remporta pas le même succès que la Septième, écrite quelques semaines auparavant.

La Symphonie n°9 en ré mineur, est une symphonie pour grand orchestre, solos et chœur mixte composée de la fin de 1822 à février 1824 et dédiée au roi Frédéric-Guillaume III de Prusse. Son finale particulièrement long (autant que la Huitième Symphonie tout entière). Il introduit des sections chantées sur l'Ode à la joie (Ode an die Freude) de Friedrich von Schiller.

Si la structure générale de cette dernière peut paraître classique avec ses quatre mouvements chacun d’entre eux innove, se déploie et prend des proportions importantes. Outre les développements thématiques impressionnants, l'exploitation méticuleuse de chaque motif, leur imbrication rigoureuse et homogène, l'œuvre se caractérise par des changements de tempos, de caractères, de mesures, d'armures et de modes jamais vus jusqu'alors dans une symphonie. Écrite pour orchestre symphonique, cette œuvre est la première du genre à se voir adjoindre dans le finale des solistes chanteurs (soprano, alto, ténor, baryton) et un chœur (sopranos, altos, ténors, basses).

Dans cette dernière symphonie, Wagner voyait venir « la rédemption de la musique », il y lisait « l’évangile humain de l’art de l’avenir ». Les instruments y tendent la main au verbe poétique (ceux de l’Ode à la joie de Schiller), l’art des sons se mêle à celui de mots et s’unisse en vue d’un art total. L’ensemble des Symphonies beethoveniennes semble avoir suscité des images de grandeur visionnaire et d’héroïsme pionnier.