C'est avec un faste tout particulier que vont se fêter en musique les 50 ans du Traité de l'Elysée, avec la présence à Paris de l'Orchestre Philharmonique de Berlin, dirigé par son chef, le charismatique Sir Simon Rattle. Coup d'envoi les 26 et 27 février, à la Salle Pleyel, avec, anniversaire oblige, deux concerts aux programmes franco-allemands passionnants. Si c'est la période romantique qui sera à l'honneur avec le Concerto no 3 de Beethoven (Soliste : Mitsuko Uchida) et les Symphonies 2 & 3 de Robert Schumann pour illustrer le génie allemand, ce ne sont point Debussy et Ravel que Rattle a choisis pour la partie française de ses programmes, mais un compositeur vivant, Henri Dutilleux, qui reçoit là une sorte de consécration, à Paris, par un des plus prestigieux orchestres de la planète. Une partition déjà ancienne Métaboles (1965) voisine avec une de ses dernières oeuvres, Correspondances, qui lui fut commandée précisément par ces mêmes interprètes en 2003.

Les musiciens allemands vont également rendre hommage au centenaire de la naissance du grand compositeur polonais Witold Lutosławski qui aimait tant la culture française et qui parlait notre langue à la perfection. De ce dernier on pourra entendre le Concerto pour violoncelle joué par le violoncelliste hongrois Miklós Perényi. Une fenêtre ouverte sur l'Europe.

Mais cette célébration ira au delà de ces deux concerts prestigieux avec la présence des musiciens berlinois pour un cycle de quatre concerts de musique de chambre qui terminera l'intégrale des oeuvres de Brahms qu'ils avaient commencée l'année dernière. Le 20 avril ce sera le pianiste anglais Stephen Kovacevich qui se joindra aux philharmonistes pour le Quatuor avec piano no 3 et la 1ère Sonate pour violoncelle et piano. Le lendemain après-midi c'est le pianiste Alexei Volodin, jeune lauréat du Concours Géza Anda, qui dialoguera à son tour avec les musiciens allemands pour le très beau Trio avec clarinette et la 2ème Sonate pour violon et piano. Les 18 & 19 juin seront consacrés à l'audition des Quatuors et des Quintettes à cordes.

La Cité de la Musique propose aussi une thématique autour de la venue des Berlinois à Paris avec, le 1er mars à 18h30, un zoom sur le Prélude à l'après-midi d'un faune de Debussy, présenté à la médiathèque par la musicologue Claire Paolacci, avant son audition à 20 heures, en version de chambre, par des musiciens allemands et français, dont Emmanuel Pahud qui est le soliste de l'Orchestre Philharmonique de Berlin depuis 1992. Ce sera aussi le point final de l'intégrale Brahms avec son merveilleux Quintette avec clarinette joué par Paul Meyer.

Cette éblouissante série de concerts s'achèvera en beauté, le 2 mars, avec un concert consacré à Johann Sebastian Bach, le compositeur sans doute le plus universellement joué, par la Philharmonische Camerata. L'idéal autoproclamé de cet ensemble, fondé en 2001 par douze instrumentistes à cordes de la Philharmonie de Berlin (sept violons, deux altos, deux violoncelles et une contrebasse), est de conjuguer la sonorité pleine de la formation symphonique avec la transparence et l’intimité de la musique de chambre. C’est avec ce double défi en tête qu’ils abordent les concertos de Bach. Pour un ou deux solistes, mais en s’approchant aussi de l’esprit du concerto grosso qui souffle dans les Brandebourgeois.

Une occasion de mesurer une fois encore qu'être musicien d'orchestre à Berlin n'est pas une fonction de second ordre, mais bien une vocation à part entière, embrassant tous les styles et transcendant toutes les époques.