Superbe enregistrement d'une des plus importantes œuvres de l'âge baroque : les Sonates du Rosaire.

Les Sonates du Rosaire de Heinrich Ignaz Franz von Biber (1644-1704) sont un immense cycle formé de quinze sonates pour violon avec basse continue et d'une passacaille pour violon seul : quinze sonates pour les quinze mystères du Rosaire – cinq mystères joyeux, cinq douloureux, cinq glorieux. Afin d’illustrer ces mystères au plus près de ce qui se ressentait alors dans l’Europe du XVIIe siècle, Biber décida, pour chaque sonate, d’accorder différemment le violon, afin d’obtenir des sonorités vraiment différentes et reconnaissables. Cela exige du soliste une sérieuse capacité à l’abstraction : en vertu de ce principe de la « scordattura », c’est à dire qu'une ou plusieurs cordes du violon sont accordées différemment de l’habituel sol-ré-la-mi, la partition écrite ne correspond pas à ce que l’on entend, puisque les cordes désaccordées deviennent transpositrices. Autrement dit, certaines notes sonnent comme ce qui est écrit, d’autres différemment, selon l’accord imposé par le compositeur. L’instrumentiste doit donc faire le même effort que vous devriez faire si une partie des touches de votre clavier d’ordinateur donnaient d’autres lettres que ce qui est écrit dessus, pas toujours les mêmes selon le morceau (pour compliquer un peu l’affaire), mais qu’il vous fallait faire comme si de rien n’était. Biber nous propose ici une musique infiniment déroutante, des sonorités parfaitement inouïes, des harmonies incongrues, un étonnant cheminement harmonique et mélodique qui le met tout à fait à part dans le monde baroque qui, en cette fin des années 1670, n’y comprit sans doute pas grand-chose, de sorte que l’ouvrage tomba dans l’oubli avant de connaître une éclatante résurrection au début du XXe siècle. La violoniste Hélène Schmitt, disciple de Reinhard Goebel, s’est spécialisée dans la musique des XVIIe et XVIIIe siècles, en particulier avec l’ensemble Luceram qu’elle a formé voici peu. Pour ces Sonates de Biber qu'elle publie chez Aeolus, elle est accompagnée au continuo par François Guerrier au claviorganum – un singulier instrument à la fois orgue et clavecin, assez en vogue aux XVIe st XVIIe siècles –, Massimo Mascardo à l’archiluth et au théorbe, Francisco Mañalich à la viole de gambe, et Jan Krigovsky au violone – un instrument de la famille des violes, entre le violoncelle et la contrebasse. Sonorités rares garanties ! Sur ces images datant de juin 2012, Hélène Schmitt interprète La Passacaille à l'église Saint-Julien à Tours :

Hélène Schmitt interprète la Passacaille de Biber

La Poétique des Signes – Raphaël Cottin

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