Sans préméditer leur coup, ce trio sans leader, issus d’une session d’après-midi, sans public ni enjeu autre que de faire connaissance entre solistes de haut vol, s’est intéressé à la musique, hors mode, de Charlie Parker. Et cette musique, qui n’était pas destinée à être montrée, s’est avérée être celle d’un projet fédérateur et même, gonflé !

Depuis quelques années, le jazz s’est en effet inspiré des expériences éclectiques (et électriques) de Miles Davis, de ses années modales (depuis Kind Of Blue) aux recherches les plus folles, On The Corner, Bitches Brew) en ignorant les fondamentaux, Louis Armstrong, Duke Ellington ou Charlie Paker. Bien qu’ayant engagé et donc fait débuté Miles Davis alors que le trompettiste n’avait que 19 ans, Charlie Parker présente une musique à l’encontre de celle que Miles développera par la suite. Tempi très rapides, thèmes tarabiscotés à partir de standards dont les harmonies sont « redéployées », enchainements d’accords complexes, sont les marques de fabrique de la musique de ce génie du saxophone alto. Autrement dit, répertoire casse-gueule pour une musique peu pratiquée (pour cause de difficulté) par les jeunes générations. Et c’est un hommage respectueux - les thèmes sont joués à la lettre - et totalement novateur en même temps car pensé de manière actuelle. Traitement électrique, presque rock, voir punk dans l’attitude, la guitare de Manu Codjia y est pour beaucoup. Voici donc un album, après l’hommage à Monk par Pierrick Pedron (« Kubic’s Monk » enregistré également en trio) qui résonne actuel, moderne et ouvert, jazz quoi !