Immense historien de la musique et producteur de blues et de folk qui fit redécouvrir des génies comme Lightnin' Hopkins et Blind Willie McTell, Samuel Charters était l'auteur d'ouvrages majeurs consacrés aux musiques noires américaines au XXe siècle.

Samuel Charters est décédé le 18 mars 2015 dans sa maison d’Arsta, en Suède où il vivait depuis les années 70 et dont il avait obtenu la nationalité. Immense historien de la musique et producteur sans qui l’histoire du blues et du folk n’aurait pas été archivée et évaluée de la même manière, il était âgé de 85 ans. Lorsqu’il publia The Country Blues, son mythique premier ouvrage en 1959, le blues acoustique du sud des Etats-Unis d’avant-guerre était un genre totalement ignoré. L’ouvrage fut évidemment un véritable tremblement de terre auprès des musicologues et des aspirants folkeux que seront alors Bob Dylan et consorts. Il publiera par la suite deux autres livres tout aussi majeurs, The Roots of the Blues puis The Legacy Of The Blues.

The Country Blues fut publié avec un disque comprenant des enregistrements des années 20 et 30 de bluesmen tels que Robert Johnson, Sleepy John Estes, Blind Willie McTell ou bien encore Bukka White, aujourd’hui reconnus à juste titre comme des légendes mais dont les disques étaient alors introuvables… Tous les musiciens « (re)découverts » par Samuel Charters deviendront évidemment les idoles de nombreux groupes de rock des années 60 et 70 comme les Allman Brothers, Canned Heat, Cream et autres Rolling Stones.

En 2011, pour son livre Blues Discovery, Matthew Ismail avait interviewé Charters. « J’ai toujours eu le sentiment, déclara ce dernier, que nous étions trop peu nombreux à faire le travail que je faisais, alors que le sujet était si vaste. C’est un peu pour cela que j’ai rédigé mes livres comme je les ai rédigés, en romançant le côté glamour de la quête des vieux chanteurs de blues. J’appelais au secours ! Le boulot est énorme et j’ai besoin d’aide ! J’ai volontairement exagéré tout ceci mais ça a marché. Lorsque je suis revenu aux États-Unis après une année passée en Europe, j’ai retrouvé plein de jeunes faisant enfin des recherches dans le Sud ! » Charters fait ici référence à John Fahey, Alan Wilson, Henry Vestine, Dick Waterman et quelques autres disciples partis sur les traces d’interprètes comme Bukka White, Skip James et Son House, musiciens dont la carrière sera alors relancée. Dans ce même ouvrage de 2011, Samuel Charters évidemment très impliqué dans la condition des Noirs aux États-Unis avait aussi déclaré : « Écrire sur la musique noire était ma participation à la lutte contre le racisme. C’est pour cela que mon travail n’était pas académique et se voulait de la pure vulgarisation. Je voulais que les gens entendent la musique noire ! »

Parallèlement à ses écrits, Charters se lança aussi dans la captation sonore. Ainsi, en 1958, il s’envola pour les Bahamas afin d’y enregistrer Joseph Spence puis, un an plus tard, Lightnin’ Hopkins. Il travaillera ensuite pour de nombreux labels comme Folkways, Prestige, Vanguard et bien d’autres. Le jazz fut également au cœur de ses préoccupations et il rédigera Jazz New Orleans et Jazz: A History of the New York Scene avec Leonard Kunstadt. Il s’intéressera également au blues électrique de Chicago. Il produira des sessions pour Junior Wells, Buddy Guy, James Cotton et Charlie Musselwhite.

Sam Charters - Singing the Blues at UConn

UConn